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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 36e Législature
Volume 137, Numéro 75

Le mercredi 17 juin 1998
L'honorable Gildas L. Molgat, Président


LE SÉNAT

Le mercredi 17 juin 1998

La séance est ouverte à 13 h 30, le Président étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

La conférence Ocean Opportunities for Tomorrow

Tenue en Colombie-Britannique

L'honorable Gerald J. Comeau: Honorables sénateurs, le sénateur Pat Carney, qui se remet d'une opération, m'a demandé de vous faire en son nom la déclaration suivante concernant la conférence intitulée: «Ocean Opportunities for Tomorrow».

Honorables sénateurs, les régions du nord et de la côte de la Colombie-Britannique font face cette année à des problèmes sans précédent. La pêche au saumon, jusqu'ici une partie essentielle de l'économie régionale, connaît des restrictions et une restructuration considérables. La crise majeure qui frappe les stocks de saumon coho dans la partie nord de la rivière Skeena ne laisse aucun doute: c'est le nord de la Colombie-Britannique qui essuiera le plus gros des conséquences des ajustements apportés cette année dans le secteur de la pêche. L'exploitation forestière, une autre des principales industries de la région, est fortement touchée par la chute des prix de la pâte à papier, par l'effondrement de l'économie asiatique et par une vive concurrence de la part des pays en développement. Skeena Cellulose, qui emploie directement 800 personnes à Prince Rupert et indirectement 12 fois ce chiffre dans la région avoisinante, a échappé à la faillite grâce à un renflouement massif de la province.

Face à ces difficultés, les habitants des régions côtières de la Colombie-Britannique font preuve de ce ressort et de cette ingéniosité qui leur est typique, je crois. Le mois dernier, la Canadian Ocean Frontiers Research Initiative, le Northern Maritime Institute et le Coastal Community Network ont réuni les parties intéressées et les décideurs de toute la région côtière de la Colombie-Britannique afin d'établir ensemble un plan de développement économique à long terme et durable. La conférence Oceans Opportunities for Tomorrow, organisée par la nation tsimshian et la belle ville des arcs-en-ciel, Prince Rupert, a fourni aux collectivités côtières un forum où discuter des possibilités qui s'offrent à la région et mettre au point des solutions locales.

À son grand regret, des problèmes de santé ont forcé le sénateur Carney à se retirer de la conférence, mais elle voudrait attirer l'attention de ses honorables collègues sur certains points saillants.

Durant les deux jours de la conférence, on a mis l'accent sur de nouvelles industries maritimes et à valeur ajoutée, comme la culture du poisson, des crustacés et coquillages et du varech, ainsi que des industries médicales et de produits de santé connexes, la restauration et la mise en valeur de l'habitat du saumon, l'exploration pétrolière et gazière en mer, le tourisme et le rôle de la recherche et du gouvernement dans le développement à venir. Les participants se sont ensuite lancés dans l'établissement de stratégies et d'objectifs pour le développement à long terme de leurs collectivités et de leur région.

Ce processus a offert une véritable occasion de dialogue entre les intéressés autochtones et non autochtones et a permis de discuter de questions controversées comme la pisciculture et le moratoire sur l'exploration pétrolière et gazière en mer. Cela a également donné la chance aux gens de la côte ouest de décider eux-mêmes de leur avenir.

Je voudrais féliciter les organisateurs de la conférence et les participants pour l'esprit d'initiative et le travail acharné qui ont entouré cet événement très important. De nombreux défis restent à relever. Nous sommes persuadés que la force de caractère et les grandes compétences des gens de la côte Ouest leur permettront de s'en sortir.

Honorables sénateurs, nous sommes impatients de partager avec vous leur succès.

 

Son Excellence Jon Baldvin Hannibalsson

Nouvel ambassadeur de l'Islande à Washington et à Ottawa

L'honorable Janis Johnson: Honorables sénateurs, je voudrais attirer votre attention sur la visite, la semaine dernière, de Son Excellence Jon Baldvin Hannibalsson, le nouvel ambassadeur de l'Islande à Washington et à Ottawa, et de son épouse, Mme Bryndis Schram.

L'ambassadeur Hannibalsson a présenté ses lettres de créance au Gouverneur général et a ensuite rencontré, à Ottawa, des représentants des ministères des Affaires étrangères, des Pêches, des Affaires indiennes et du Nord canadien, ainsi que du Patrimoine canadien. Son Excellence a également assisté à des réunions avec le comité du millénaire de la Commission Canada-Islande, un groupe planifiant des célébrations pour l'an 2000.

L'ambassadeur Hannibalsson est un ancien ministre des Affaires étrangères d'Islande et un politicien de carrière depuis 30 ans. Il a dirigé des discussions importantes qui ont conduit à une entente avec l'Europe qui donne à l'Islande un accès libre au marché européen sans que ce pays soit membre à part entière. Avant son entrée en politique, il était enseignant et il a toujours conservé un intérêt dans l'éducation et la jeunesse. Comme la plupart des Islandais, l'ambassadeur est vivement intéressé par l'importance de l'apprentissage et de l'alphabétisation.

On dit que les Égyptiens ont leurs pyramides et les Islandais leur sagas. Je peux vous confirmer cet amour de l'acquisition de la connaissance, car c'est une chose inhérente lorsqu'on grandit avec cette influence dans un foyer islandais.

Madame Schram, la femme de l'ambassadeur, est une actrice bien connue et une personnalité de la télévision en Islande. Elle est également directrice de l'Office islandais de financement des films. Leur combinaison de talents les aidera beaucoup à jouer leur nouveau rôle d'ambassadeurs de l'Islande et je sais qu'ils serviront bien leur pays en Amérique du Nord.

Honorables sénateurs, alors que nous approchons du nouveau millénaire, tout le monde va célébrer à sa manière. Dans le cas des Canadiens d'origine islandaise, nous marquerons le millénaire de la découverte de l'Amérique du Nord par l'Islandais Leifur Eriksson. Leifur et son équipage ont débarqué en Amérique du Nord à l'Anse aux Meadows, dans la grande péninsule du nord de Terre-Neuve, en l'an 1000. Un de nos projets du millénaire sera axé sur cet important événement. Les plans que l'on prépare actuellement prévoient la participation de l'Islande, du Groenland, du Canada et des États-Unis à une répétition du voyage de Leifur vers le Nouveau Monde. Une réplique d'un navire viking de l'époque sera construite pour refaire le même voyage. C'est du moins notre espoir.

(1340)

En plus de cela, il y aura des expositions, notamment une grande expédition du Smithsonian Institute de Washington, qui comprendra beaucoup d'objets. Enfin, on préparera des brochures, du matériel éducatif et des films sur l'histoire des Islandais, les voyages et l'histoire de ces peuples et de leurs ancêtres vikings, qui seront présentés à divers endroits en Amérique du Nord pendant l'année du millénaire.

Honorables sénateurs, il y a 30 000 personnes d'origine islandaise au Manitoba et 200 000 en Amérique du Nord. Le centre des Islandais au Canada est la Ville de Gimli, au Manitoba, où j'habite, une ville touristique renommée pour la pêche, sur les bords du lac Winnipeg. Nous sommes fiers d'être Canadiens et de célébrer notre patrimoine islandais.

L'ambassadeur Hannibalsson et ses prédécesseurs ont toujours montré un intérêt particulier pour la communauté islandaise du Canada. Au cours des années, il y a eu de nombreuses coentreprises et de nombreux échanges. Pour nous, c'est un lien important. Dans cette nouvelle ère de coopération internationale, je pense que le Canada et l'Islande ont beaucoup à apprendre l'un de l'autre, particulièrement dans le domaine de la pêche, ainsi que relativement à l'alphabétisation, aux nouvelles technologies, à la protection de l'environnement et à la mise en valeur des ressources.

Je souhaite la bienvenue au Canada au nouvel ambassadeur et lui souhaite beaucoup de succès dans ses nouvelles fonctions.

 

La Nouvelle-Écosse

La goélette Bluenose II

L'honorable Wilfred P. Moore: Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui au sujet de notre fameux voilier qui joué le rôle d'ambassadeur de bonne volonté, la goélette Bluenose II. Avec ses 181 pieds de longueur, le Bluenose II est certainement le plus beau voilier du monde.

J'ai le plaisir d'agir à titre de président volontaire du fonds de préservation du Bluenose II, l'organisme de charité responsable de l'entretien et du fonctionnement de ce symbole national.

L'an dernier, le navire a entrepris une tournée du Canada qui devait durer deux ans. Le départ officiel s'est fait le 29 mai 1997; il fut le premier navire à passer sous le pont de la Confédération, qui relie le Nouveau-Brunswick à l'Île-du-Prince-Édouard. Le Bluenose II a navigué jusqu'à Thunder Bay, à l'ouest, pour revenir à son port d'attache, Lunenburg, le 22 août, après avoir franchi 5 000 milles nautiques et visité 23 ports du Québec, de l'Ontario et des quatre provinces atlantiques. Plus de 162 000 fiers Canadiens ont visité ses ponts. C'est à Montréal qu'il a connu son record d'affluence; 11 200 personnes sont montées à bord en neuf heures et demie. Les Canadiens aiment ce navire, et nous aimons le partager avec eux.

Le 24 juillet 1997, le Bluenose II a visité la ville de La Baie, pour souligner le premier anniversaire de la grande inondation. Le capitaine Wayne Walters, commandant du navire, est allé porter deux sacs postaux pleins de cartes postales au Musée du fjord. Ces cartes postales, dont un bon nombre avaient été envoyées par des enfants des écoles de la Nouvelle-Écosse, présentaient des messages d'encouragement propres à inspirer les habitants de cette région dévastée. Les cartes postales font maintenant partie de l'exposition permanente du musée.

Dimanche soir dernier, 1 000 personnes se sont rassemblées sur le quai de Lunenburg pour souhaiter bon voyage au Bluenose II, qui partait pour la Colombie-Britannique, entamant ainsi sa tournée des régions de l'Ouest du Canada. Le navire fera escale aux Bermudes et en Jamaïque. Il fera aussi une escale en mer, près du récif de l'Île à Vache, au large de la pointe sud-ouest d'Haïti, où le premier Bluenose a sombré, le 28 janvier 1946.

À partir de là, le navire empruntera le canal de Panama et remontera la côte du Mexique et de la Californie pour se rendre en Californie. Le navire croisera dans les eaux de la Colombie-Britannique durant un mois, visitant huit ports. Son premier port d'escale sera Port Alberni, où il est attendu le 11 août. De là, il filera vers le nord, jusqu'à Prince Rupert, puis vers l'ouest jusqu'à la ville de Queen Charlotte, avant de redescendre vers Gibsons, Nanaimo, Ganger, Victoria et Vancouver. Le Bluenose II quittera Vancouver le 11 septembre. Son retour à Lunenburg est prévu pour le 30 octobre. Ce voyage de 15 000 milles nautiques sera un événement historique pour le navire et son équipage mixte.

J'invite tous les sénateurs à suivre les déplacements du navire en visitant son site Web à l'adresse www.bluenose2.ns.ca.

 

Les droits de la personne

Les crimes haineux et les actes de discrimination

L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, le dimanche 7 juin, James Byrd Junior, un homme de 49 ans, père de trois enfants, a été enlevé à Jasper, au Texas, par trois hommes blancs. Il a été battu jusqu'à ce qu'il puis enchaîné derrière une camionnette et traîné sur une distance de trois milles. Il en est mort. James Byrd a été tué uniquement à cause de la couleur de sa peau.

Aussi répréhensible, inconcevable, choquant et brutal que soit cet acte, il ne constitue pas un incident isolé. Deux autres crimes semblables sont survenus depuis.

Même si cet acte barbare s'est produit aux États-Unis, les Canadiens doivent se garder de croire que les crimes haineux ne se produisent que chez nos voisins du sud. Le Canada n'est pas à l'abri des crimes haineux ou des actes de discrimination.

L'an dernier, Julian Roberts, professeur à l'Université d'Ottawa, a effectué pour le ministère de la Justice fédéral, à Ottawa, une étude sur les crimes liés à la haine et aux préjugés. Son étude a démontré qu'au cours des trois dernières années, le nombre de crimes liés à la haine et aux préjugés a augmenté d'environ 50 p. 100 au Canada.

Mme Roberts estime que 60 000 crimes haineux sont commis chaque année dans les neuf centres urbains du Canada, notamment à Halifax, Montréal, Ottawa, Toronto, Winnipeg, Calgary, Edmonton et Vancouver. L'étude démontre qu'environ 61 p. 100 de ces crimes ont été commis contre des minorités raciales, un pourcentage à peu près identique à celui des États-Unis.

Les crimes haineux ne sont que la pointe de l'iceberg. La discrimination contre les minorités visibles existe dans le système judiciaire, comme en fait foi la décision de la Cour suprême concernant le juge Sparks, dont j'ai parlé au Sénat il y a environ trois mois. Les Canadiens ont la prétention de croire que notre société est plus ouverte, plus tolérante que la société américaine, mais ce n'est malheureusement pas le cas.

Les minorités raciales au Canada continuent de faire face à des problèmes majeurs en milieu de travail. Le 15 février 1997, j'ai parlé, au Sénat, de la poursuite judiciaire intentée contre la société Texaco aux États-Unis, par des travailleurs noirs qui voulaient mettre fin à la culture discriminatoire qui existe dans cette société.

Une affaire de pareille ampleur ne s'est pas encore produite au Canada. Toutefois, Robert Swidinsky, de l'Université de Guelph, affirme dans une étude qu'il a effectuée en 1997 que les travailleurs qui font partie de minorités visibles sont victimes d'une sérieuse discrimination salariale et professionnelle. La même année, un autre chercheur, James Torczyner, de l'Université McGill, a établi qu'à niveau d'éducation égal, les Noirs accusent un taux de chômage plus élevé que les Blancs, soit 15 p. 100 comparativement à 10 p. 100.

La fonction publique fédérale elle-même n'échappe pas aux critiques. Comme je l'ai déjà signalé, le rapport de 1997 sur l'équité en matière d'emploi a démontré qu'en dépit de la loi, qui est en vigueur depuis dix ans, la véritable égalité et l'égalité des chances en matière d'avancement n'existent pas dans la fonction publique fédérale.

Les personnes, indépendamment de leur race ou de la couleur de leur peau, doivent demeurer vigilantes dans la lutte contre le racisme et l'inégalité. Honorables sénateurs, nous avons un devoir au Canada, celui de prendre l'initiative dans la lutte contre la discrimination et le racisme. Nous devons donner l'exemple, nous élever au-dessus de la politique partisane et lutter ensemble.

La famille de James Byrd a subi une perte terrible. J'invite les honorables sénateurs à trouver une façon, collectivement ou autrement, d'envoyer leurs condoléances à cette famille et, par la même occasion, de lui faire savoir que nous condamnons cet acte insensé.

 

Le Sénat

Réflexions sur les whips des divers partis

L'honorable Philippe Deane Gigantès: Honorables sénateurs, j'ai parlé hier des leaders que j'ai connus. Aujourd'hui, je voudrais vous entretenir des whips. Lorsque j'ai été nommé au Sénat, j'ai eu le plaisir de découvrir que le sénateur Petten occupait le poste de whip libéral. Quel homme charmant. Naturellement, Jacques Hébert est mon meilleur ami, comme tout le monde le sait.

De l'autre côté, le sénateur Phillips m'a donné un bureau équipé d'une salle de bains.

Le sénateur Grafstein: Il vous a donné un bureau?

Le sénateur Gigantès: J'avais droit à ce bureau. De toute façon, il m'a donné un bureau équipé d'une salle de bains. Même si nous étions des adversaires et qu'il nous arrivait parfois d'avoir des échanges orageux, il m'a traité avec une courtoisie infinie et je l'en remercie.

J'ai été traité de la même façon par le sénateur Kelly et mon bon ami d'en face, le sénateur Kinsella. Je sais qu'il a étudié chez les dominicains; pour ma part, je suis un produit des jésuites.

Il y a eu aussi ce moment sublime où le sénateur DeWare m'a escorté ici. Cela m'a véritablement comblé.

[Français

L'unité nationale

La défense et la promotion des intérêts régionaux

L'honorable Jean-Claude Rivest: Honorables sénateurs, une des responsabilités de cette Chambre est de défendre et de promouvoir les intérêts régionaux au pays.

À la faveur des réductions budgétaires auxquelles le gouvernement fédéral s'est livré au cours des dernières années, je pense que tous et chacun des membres de cette Chambre doivent être conscients des difficultés considérables que l'ensemble des Canadiens ont eu à vivre dans le domaine de la santé, de l'éducation et des services sociaux.

C'est pourquoi j'invite tous les honorables sénateurs à manifester leur sensibilité au premier ministre du Canada sur les besoins financiers extrêmement urgents et pressants que rencontrent les gouvernements provinciaux au Canada.

(1350)

Également, honorables sénateurs, je regrette la façon quelque peu cavalière dont le premier ministre du Canada a traité les revendications des premiers ministres des provinces lorsqu'il a déclaré hier que, comme d'habitude, les provinces demandaient de l'argent au fédéral sans avoir jamais rien à offrir.

Je voudrais rappeler à l'honorable premier ministre du Canada que si son gouvernement a réussi à rétablir les finances publiques, c'est en raison de l'effort des Canadiens qui y ont contribué très fortement et, en particulier, de ceux qui dépendent des services provinciaux. Les gouvernements des provinces ont fait la plus grande partie du travail pour que le gouvernement canadien atteigne son équilibre budgétaire.

Je voudrais rappeler au premier ministre du Canada que les besoins des personnes âgées, de l'enfance, des travailleurs dans les hôpitaux et les services sociaux sont extrêmement pressants. Tous ces services sont de la responsabilité des gouvernements provinciaux et ceux-ci, pour répondre aux attentes du peuple canadien, doivent disposer de ressources additionnelles.

La déclaration de l'honorable premier ministre est d'autant plus scandaleuse que l'on sait tous que des surplus budgétaires s'annoncent et que le gouvernement fédéral prend des initiatives unilatérales, comme les bourses du millénaire, alors que les besoins prioritaires sont d'autant plus pressants.

On sait que les surplus de l'assurance-emploi doivent être retournés aux travailleurs qui ont payé, soutenu et fait les efforts pour permettre au gouvernement canadien de rééquilibrer son budget.

Quant au plan des pensions, une étude publiée récemment à Toronto a démontré que dans quelques années, les surplus budgétaires que le gouvernement fédéral va encaisser se chiffreront à plusieurs milliards de dollars.

Tous les membres dans cette Chambre, quelle que soit leur orientation politique, devraient unanimement soutenir les demandes sérieuses, répétées et responsables des premiers ministres provinciaux afin que le gouvernement fédéral redonne aux provinces la capacité financière d'assumer leurs responsabilités, celles qui touchent au bien-être, à la sécurité et à l'épanouissement des citoyens du Canada.

 


[Traduction

AFFAIRES COURANTES

La Loi sur le Parlement du Canada
La Loi sur les allocations de retraite des parlementaires
La Loi sur les traitements

Projet de loi modificatif-Rapport du comité

L'honorable Michael Kirby, président du comité sénatorial permanent des banques et du commerce, présente le rapport suivant:

Le mercredi 17 juin 1998

Le comité sénatorial permanent des banques et du commerce a l'honneur de présenter son 

TREIZIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été déféré le projet de loi C-47, Loi modifiant la Loi sur le Parlement du Canada, la Loi sur allocations de retraite des parlementaires et la Loi sur les traitements, a, conformément à l'ordre de renvoi du mardi 16 juin 1998, étudié ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement.

Respectueusement soumis, 

Le président,
MICHAEL KIRBY

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand le projet de loi sera-t-il lu une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Carstairs, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

 

Projet de loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie

Rapport du comité

L'honorable Charlie Watt, président du comité sénatorial permanent des peuples autochtones, présente le rapport suivant:

Le mercredi 17 juin 1998

Le comité sénatorial permanent des peuples autochtones a l'honneur de présenter son 

SIXIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été déféré le projet de loi C-6, Loi constituant certains offices en vue de la mise en place d'un système unifié de gestion des terres et des eaux de la vallée du Mackenzie et modifiant certaines lois en conséquence, a, conformément à l'ordre de renvoi du 16 juin 1998, entendu la ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, a étudié ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement.

Respectueusement soumis, 

Le président,
CHARLIE WATT

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand le projet de loi sera-t-il lu une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Carstairs, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

 

La loi sur l'éducation des Mi'kmaq

Rapport du comité

L'honorable Charlie Watt, président du comité sénatorial permanent des peuples autochtones, présente le rapport suivant:

Le mercredi 17 juin 1998

Le comité sénatorial permanent des peuples autochtones a l'honneur de présenter son 

SEPTIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été déféré le projet de loi C-30, Loi concernant les pouvoirs des Mi'kmaq de la Nouvelle-Écosse en matière d'éducation, a, conformément à l'ordre de renvoi du 16 juin 1998, étudié ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement.

Respectueusement soumis, 

Le président,
CHARLIE WATT

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand le projet de loi sera-t-il lu une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Butts, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

 

Projet de loi d'intérêt privé

Loi concernant l'Alliance des manufacturiers et des exportateurs du Canada-Première lecture

L'honorable James F. Kelleher présente le projet de loi S-18, Loi concernant l'Alliance des manufacturiers et des exportateurs du Canada.

Le projet de loi est lu une première fois.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Kelleher, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

 

Affaires sociales, sciences et technologie

Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat.

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)a) du Règlement, je propose:

Que le comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soit autorisé à siéger aujourd'hui à 15 h 30, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Honorables sénateurs, si vous me le permettez, j'aimerais dire un mot sur la raison qui me pousse à déposer cette motion maintenant.

Son Honneur le Président: Le sénateur est-il autorisé à prendre la parole?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Murray: Honorables sénateurs, c'est notre cinquième rencontre, et probablement la dernière, sur le projet de loi C-19. Nous avons prévu d'entendre cet après-midi notre dernier témoin, le ministre du Travail, M. Lawrence MacAulay. Il doit être présent à 15 h 30. Comme la plupart des ministres, il ne dispose pas de beaucoup de temps. Nous aimerions donc passer une heure ou une heure et demie avec lui.

(1400)

Au cas où il y aurait un débat au Sénat après 15 h 30, je demande que l'autorisation soit accordée au comité de commencer à siéger à cette heure-là.

(La motion est adoptée.)

 

Affaires juridiques et constitutionnelles

Autorisation au comité de siéger en même temps que le sénat

L'honorable Lorna Milne: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)a) du Règlement, je propose:

Que le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit autorisé à siéger aujourd'hui, à 15 h 30, même si le Sénat siège à ce moment-là et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Honorables sénateurs, mon explication est la même que celle de l'honorable sénateur d'en face. Si le Sénat siégeait encore à 15 h 30 cet après-midi, par déférence pour l'opposition, nous aimerions poursuivre l'étude du projet de loi S-15.

Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

[Français]

 

Transports et communications

Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat

L'honorable Marie-P. Poulin: Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'article 58(1)a) du Règlement, je propose:

Que le sous-comité des communications du comité sénatorial permanent des transports et des communications soit autorisé à siéger à 15 h 30 aujourd'hui, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application de l'article 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

[Traduction

Le Sénat

L'interprétation de certaines règles-Avis de motion

L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, je donne avis que, d'ici deux jours, je proposerai:

Que le Sénat a pris connaissance de la question de privilège soulevée le 11 juin 1998 concernant l'abolition du Sénat, de la décision du Président du Sénat rendue le 16 juin 1998, de même que de l'article 43 du Règlement du Sénat concernant les questions de privilège;

Que le Sénat désire une clarification, une définition et un consensus à propos de la construction, de l'interprétation et de la signification des mots «fondée à première vue» dans l'application de l'article 43 du Règlement du Sénat par le Président du Sénat et par les sénateurs, et plus particulièrement du paragraphe 43(12) à l'égard du mot «juge» et des mots «question de privilège fondée à première vue»;

Que, par conséquent, le Sénat renvoie au comité sénatorial permanent des privilèges, du Règlement et de la procédure les points soulevés dans ma question de privilège du 11 juin 1998, la décision du Président rendue le 16 juin 1998 et l'article 43 du Règlement du Sénat, particulièrement le paragraphe 43(12), pour qu'il examine les privilèges ainsi que la signification, la construction, l'interprétation et l'intention des mots «question de privilège fondée à première vue».

 

Les travaux du Sénat

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je n'ai pas donné avis de motion; ce que je vais faire est donc tout à fait irrégulier. Je sais cependant que des sénateurs vont assister à des réunions de comité cet après-midi et je dois donc les informer que les lieux de ces réunions ont été changés. En effet, nous voulions que tous les comités siègent dans cet édifice aujourd'hui.

Ainsi, le comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles se réunira dans la salle 256-S; le comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunira dans la salle 356-S et le sous-comité des communications du comité sénatorial permanent des transports et des communications se réunira dans la salle 172-E.

 

La Garde et le droit de visite des enfants

La déformation du compte rendu officiel des séances du comité-Avis d'interpellation

L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, je donne avis que, dans deux jours, j'attirerai l'attention du Sénat sur les propos suivants concernant le comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants qui ont été prononcés à l'autre endroit ou qui ont paru dans les médias et sur la comparaison entre ces propos et les passages pertinents du compte rendu officiel des séances dudit comité. En voici des échantillons:

 

d'un bout à l'autre du pays, les audiences sur la garde des enfants et le droit de visites sont devenues autant d'occasions d'intimider et de bafouer les femmes qui dénoncent la violence conjugale;
les femmes ont été sifflées et huées;
la violence dont elles sont l'objet a été niée;
Les audiences sur la garde des enfants bouleversent les témoins - Les femmes accusent les membres du comité d'être dédaigneux;
Les femmes sont secouées par les audiences sur la garde des enfants - L'interrogatoire en règle dont les mères sont l'objet aux mains du comité les bouleverse;
Selon une députée, les femmes sont l'objet de railleries de la part du comité qui étudie le divorce - Les femmes qui déclarent avoir été maltraitées sont intimidées;
Les groupes féministes s'insurgent contre les méthodes brutales du comité - Des plaintes ont été déposées contre le comité sur la garde des enfants;
ces hommes ont éclaté de rire, jetant quolibets et invectives;
leur haine des femmes et leur fiel à leur égard frisait l'hystérie;
le comportement agressif et violent de ces hommes pendant les audiences du comité témoigne de la crainte qu'ils inspirent.

Visiteurs de marque

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je tiens à signaler la présence à notre tribune de visiteurs de marque venus d'Australie. Il s'agit des membres du comité d'examen de la législation et de la réglementation du Parlement de Victoria.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue à notre Sénat.

Des voix: Bravo!

 


PÉRIODE DES QUESTIONS

L'énergie

La nomination d'un nouveau président de l'Office national de l'énergie-La position du gouvernement

L'honorable Ron Ghitter: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et a trait à l'industrie pétrolière et gazière du Canada. Cela fait maintenant près de deux ans que le gouvernement sait que le président de l'Office national de l'énergie a l'intention de prendre sa retraite. À la fin de 1997, Roland Priddle a remis sa démission. Six mois après la date de sa démission, aucune mesure n'a encore été prise pour lui nommer un remplaçant. L'honorable leader aurait-il l'obligeance de nous dire si le gouvernement a l'intention de nommer un nouveau président de l'Office national de l'énergie, et quand?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je n'ai rien entendu dire qui contredise que le gouvernement nommera un nouveau président. Quant à savoir quand il le fera, je n'en suis pas exactement certain. Cependant, je m'en informerai certainement cet après-midi, et je pourrai peut-être communiquer cette information demain.

 

Les affaires étrangères

L'Afrique-L'intervention du Sénégal en Guinée-Bissau-La position du gouvernement

L'honorable Eymard G. Corbin: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Des nouvelles nous apprennent que des troupes sénégalaises ont traversé la frontière avec la Guinée-Bissau à la poursuite, apparemment, de séparatistes sénégalais, mais cela se produit dans le contexte d'une rébellion en Guinée-Bissau. La capitale, Bissau, est apparemment vide, et 150 000 réfugiés sont sur les routes.

Comme l'honorable leader le sait, le Canada et le Sénégal ont entretenu des échanges importants et certes des liens d'amitié au fil des années. Pour ma part, je crains que la situation ne s'aggrave pour devenir un autre point chaud en Afrique et provoquer à coup sûr une autre tragédie humaine. Je le dis en m'appuyant sur des événements survenus antérieurement sur ce continent.

Je voudrais avoir du leader du gouvernement l'assurance que le ministre des Affaires étrangères suit la situation de près et qu'il exercera ses bons offices pour rétablir la stabilité dans la région, de manière à éviter que nous ayons, après coup, à participer de nouveau à des opérations de maintien de la paix.

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le sénateur a parfaitement décrit les événements survenus dans cette région du monde. Je sais que de nombreux sénateurs ont des amis personnels au Sénégal. La question est très préoccupante. Je sais que le ministère des Affaires étrangères suit l'évolution de la situation quotidiennement. Je vais porter les inquiétudes de l'honorable sénateur directement à l'attention du ministre des Affaires étrangères.

 

La situation au Kosovo, en Serbie-Le rôle des forces et des aéronefs canadiens dans la mission de l'OTAN-La position du gouvernement

L'honorable Donald H. Oliver: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Lundi, tous les États membres de l'OTAN, à l'exception du Canada, ont participé à l'envoi de chasseurs dans le cadre d'une démonstration de force au-dessus de la province du Kosovo. Étant donné que nous avons des chasseurs disponibles ainsi que des ravitailleurs à long rayon d'action qui peuvent refaire le plein de ces chasseurs de manière à leur permettre de se rendre en Europe, pourquoi le Canada n'a-t-il pas participé à l'opération?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, comme je l'ai expliqué hier ou avant-hier en l'absence du sénateur, le gouvernement du Canada suit constamment l'évolution de la situation. Je pense que les avions de chasse qui auraient pu être envoyés sont basés à Cold Lake, en Alberta, et à Bagotville, au Québec, et que c'est parce qu'ils sont situés à proximité de cette région du monde que les autres pays ont pu participer à l'opération. Par ailleurs, le gouvernement du Canada a appuyé les mesures prises.

 

Le Sénat

La campagne menée par un député en faveur de l'abolition du Sénat-La position du gouvernement

L'honorable Edward M. Lawson: Honorables sénateurs, j'ai une série de questions à poser au leader du gouvernement au Sénat au sujet du projet du millénaire du député libéral Roger Gallaway, qui consiste à faire circuler des pétitions au Canada en faveur de l'abolition du Sénat.

J'ai un court préambule à faire. Nous savons tous que c'est vraiment une tragique farce politique, parce que le Sénat ne peut être aboli sans une modification constitutionnelle, avec l'assentiment des provinces et du gouvernement fédéral. Toutefois, nous devons nous occuper de la façon dont cela est présenté à la population. Les Canadiens ont le droit de savoir ce qu'ils perdraient et ce qu'ils gagneraient.

Ils perdraient l'examen détaillé et expert par le Sénat et ses comités de projets de loi adoptés par l'autre endroit. Ils perdraient tout le travail exceptionnel que les comités ont accompli dans le passé et que nous tenons pour acquis: le rapport du sénateur Davey sur les médias, le rapport Croll sur la pauvreté, le rapport Lamontagne sur les sciences et la technologie, le rapport Sparrow sur l'érosion des sols et des dizaines d'autres. Ils perdraient aussi la sagesse et l'expérience des sénateurs de toutes les provinces, des territoires et des régions - et pour toujours.

Que gagneraient-ils? Selon le député libéral Roger Gallaway, ils gagneraient 50 millions de dollars.

Comment en profiteraient-ils? Cela se traduirait-il par une réduction d'impôt immédiate? Non. Cela se traduirait-il par une réduction de la dette nationale? Non. Les fonds récupérés seraient-ils réaffectés à la santé? Non. À quoi serviraient-ils? Selon Roger Gallaway, les 50 millions de dollars iraient au budget de la Chambre des communes.

Le budget actuel s'élève à 230 millions de dollars, à ce qu'on me dit. Il serait donc porté à 280 millions de dollars, soit seulement 21 millions de dollars en deçà du coût d'un million de dollars par député. Je ne doute pas que les députés feront l'impossible pour atteindre ce montant. Je vois cela d'ici: dans tout le Canada, on verra de nouveaux films sur les projets du millénaire. Le film? La cupidité de Gallaway, ou l'histoire titanesque de la seule Chambre du Parlement ayant survécu, la Chambre des communes, au coût modeste d'un million de dollars seulement par député d'ici le nouveau millénaire.

Passons maintenant aux questions. Étant donné que seuls le Conseil du Trésor et le gouvernement auront le pouvoir de réaffecter les 50 millions de dollars en cause au budget de la Chambre des communes après l'abolition du Sénat, le député libéral, M. Gallaway, possède-t-il des renseignements inédits à l'avance ou tente-t-il simplement d'escroquer la population canadienne? Ma deuxième question est la suivante: le premier ministre et le gouvernement appuient-ils le projet du millénaire de Gallaway, qui est d'abolir le Sénat? Normalement, je ne soulèverais pas cette question, mais les sénateurs d'en face ont été étrangement discrets pendant que nous subissions des attaques. Appuient-ils ce projet? Le premier ministre et le gouvernement croient-ils qu'il manque 50 millions de dollars au budget de la Chambre des communes?

M. Gallaway affirme également qu'il va envoyer ses pétitions à tous les députés, y compris aux 150 et quelque députés libéraux. Ma dernière question est celle-ci: la majorité libérale à la Chambre des communes appuiera-t-elle ce projet du millénaire en faisant circuler des pétitions en faveur de l'abolition du Sénat? Si oui, le premier ministre et le gouvernement appuient-ils ce projet du millénaire? Sinon, je voudrais qu'ils le disent clairement.

En toute justice envers le leader du gouvernement, je dirai que je ne m'attends pas à ce qu'il puisse répondre à ces questions aujourd'hui. Je serai très satisfait si je reçois une réponse écrite pendant l'été. Je peux garantir que c'est la dernière question que je poserai avant l'été.

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je vais tenter de répondre. Bien sûr, une partie de la question est hypothétique.

Pour répondre aux questions dans l'ordre, je ne veux émettre aucun commentaire sur quoi que ce soit pouvant se rapporter à une escroquerie. Quant aux trois autres questions posées par le sénateur, je répondrai sans hésiter par un non catégorique.

Je reprends un commentaire déjà entendu: le Sénat du Canada est le corps législatif le plus efficient, en terme de coût par habitant, de tout le Canada. Cela inclut les deux Chambres du Parlement et toutes les assemblées législatives provinciales et territoriales.

Pour ce qui est de l'initiative de M. Gallaway, je devrais peut-être rappeler qu'il a reconnu que le Sénat était un élément très important de nos institutions parlementaires lorsqu'il a accepté de coprésider le comité mixte spécial du Sénat et de la Chambre des communes sur la garde et le droit de visite des enfants, un comité né à l'initiative du Sénat et non pas de la Chambre des communes.

Les sénateurs qui veulent consulter le dossier des présences des sénateurs et des députés aux audiences que ce comité a tenues dans chacune des régions du Canada constateront que les sénateurs sont nettement plus assidus que les membres de l'autre endroit.

 

Les anciens combattants

Le statut actuel du Centre de santé Perley-Rideau pour anciens combattants-Demande de réponse

L'honorable Orville H. Phillips: Honorables sénateurs, la semaine dernière, j'ai attiré l'attention du leader du gouvernement au Sénat sur la situation dans laquelle se trouve le Centre de santé Perley-Rideau pour anciens combattants. Je lui ai alors demandé de communiquer avec le ministre des Anciens combattants et d'essayer de le convaincre d'assumer ses responsabilités en représentant les anciens combattants qui sont des patients de ce centre de santé dans l'affaire qui est actuellement devant les tribunaux.

Le leader a-t-il obtenu une réponse du ministre des Anciens combattants?

(1420)

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai fait les démarches nécessaires et j'ai demandé une réponse, que j'espère avoir demain.

 

Le remplacement possible du ministre lors d'un remaniement ministériel-La position du gouvernement

L'honorable Orville H. Phillips: Honorables sénateurs, j'ai une question complémentaire à poser. Selon les pontifes politiques à Ottawa, un remaniement ministériel serait imminent et M. Mifflin ne serait alors plus membre du Cabinet. Par conséquent, j'exhorte le leader du gouvernement à faire tout ce qu'il peut pour essayer d'obtenir une réponse favorable de M. Mifflin avant que celui-ci ne perde sa place au Cabinet, en espérant que ce sera en faveur du sénateur Rompkey.

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le choix des membres du Cabinet est évidemment la prérogative du premier ministre et de personne d'autre.

Toutefois, ayant eu le privilège de servir aux côtés du ministre Mifflin au cours de la dernière année, je peux vous dire qu'il fait du travail exceptionnel en tant que ministre des Anciens combattants. Il est lui-même un ancien combattant qui a gravi les échelons, de cadet de la marine dans sa province natale jusqu'au grade d'amiral dans nos forces armées. Personne ne mérite davantage le poste de ministre des Anciens combattants que le ministre Mifflin.

 

L'exploitation forestière

Le règlement du conflit du bois d'oeuvre-L'échec du système de contingents-La possibilité d'indemniser les intéressés-Demande de réponse

L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Elle fait suite à la question que j'ai posée la semaine dernière, dans cette enceinte, au sujet de l'accord sur le bois d'oeuvre et des contingents qui ont été imposés. Comme en témoigne la page 1723 des Débats du Sénat, l'honorable sénateur Graham m'a répondu alors:

Honorables sénateurs, je crois savoir que ces négociations visent à supprimer les quotas. Nous sommes maintenant le 10 juin, et, si je ne m'abuse, les Douanes américaines publieront leur décision finale vers la mi-juin.

Le leader du gouvernement a-t-il des renseignements dont il peut nous faire part pour répondre plus en détail à cette question?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, malheureusement, je n'en ai pas. La dernière fois que vous avez posé une question là-dessus, c'était le 15 juin. Je crois que les Douanes américaines ont publié l'avis d'abrogation le 15 avril de cette année, et c'est pourquoi j'attendais la date du 15 juin. Cet avis portait sur leur examen de la classification de 1997 des montants prépercés qui n'étaient pas visés par l'accord Canada-États-Unis sur le bois d'oeuvre. Les Douanes américaines devraient publier leur décision finale d'ici quelques jours. Si je ne m'abuse, la date d'entrée en vigueur suivra de 60 jours la date de publication de la décision finale.

Le sénateur St. Germain: Honorables sénateurs, maintenant que le leader du gouvernement au Sénat a signalé que les négociations pour supprimer ce quota font partie du programme du gouvernement, le gouvernement reconnaît-il que l'accord sur le bois d'oeuvre est une très mauvaise entente pour le Canada? Il a conduit à la perte de milliers d'emplois et de centaines de millions de dollars pour le secteur forestier.

J'hésite à poser cette question, mais je veux défendre les intérêts d'un secteur important. D'autres industries ont été indemnisées. Envisage-t-on d'indemniser les collectivités qui souffrent tant de cet accord avec les États-Unis?

Pour être équitable envers le gouvernement, je pense qu'il a été forcé de signer cet accord. De plus, je ne pense pas que le gouvernement ait jamais cru qu'il aurait des répercussions aussi négatives. C'est pourquoi je demande si on envisage d'indemniser les intéressés.

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, à ma connaissance, on n'envisage pas d'indemniser qui que ce soit, même si cette question pourrait fort bien être étudiée, à l'heure actuelle, par les fonctionnaires compétents.

Le Canada n'est pas d'accord avec la proposition des Douanes américaines de reclasser les montants prépercés dans une catégorie de droits différente. Après consultation avec les principaux intéressés, le Canada a choisi d'en arriver à une solution négociée. Nous espérons que les Américains s'abstiendront de prendre d'autres mesures pour reclasser les montants prépercés. Je veux assurer l'honorable sénateur que le Canada défendra ses droits avec vigueur, au besoin.

 

L'environnement

L'érosion de l'Île de Sable, en Nouvelle-Écosse-L'abattage possible d'une partie de la harde de poneys-La position du gouvernement

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, ma question concerne les poneys de l'Île de Sable. Nous avons tous lu récemment, dans la presse, que certains Canadiens du centre du pays estiment que la seule façon de sauver l'Île de Sable est d'abattre une partie des poneys qui y vivent. Cette proposition a été faite par un groupe de biologistes chargés d'examiner l'avenir de l'Île de Sable. Ils affirment, entre autres choses, que la consommation de l'herbe qui pousse dans l'île facilite l'érosion du sable et pourrait, à la limite, entraîner la disparition de l'île.

L'Île de Sable existe depuis des temps immémoriaux. Il y a fort longtemps, un prêtre français y avait importé quelques poneys. Au fil des années et avec l'aide de la Providence, ces animaux se sont reproduits, ont vécu et sont morts paisiblement, de vieillesse. Tous ceux qui ont survolé l'île à plusieurs reprises vous diront que son emplacement peut varier d'une année à l'autre. L'île continue cependant d'exister, et sa superficie n'a à peu près pas varié depuis 20 000 ans.

M. Colin Stewart, coordonnateur du programme des espèces menacées de disparition du Fonds mondial pour la nature prétend que le gouvernement aura beaucoup de difficulté à convaincre la population canadienne de la nécessité d'abattre une partie de ces chevaux.

M. Ian McLaren, professeur émérite de biologie à l'Université Dalhousie, et organisateur de la fiducie responsable de l'île, affirme que l'abattage «ne constitue absolument pas une solution envisagée».

Je demande au ministre de promettre à tous les résidents de la Nouvelle-Écosse, qui considèrent ces poneys comme le symbole de notre force, de notre endurance, de notre ténacité et de plusieurs autres qualités qui font honneur à notre société, que les autorités fédérales ne seront jamais autorisées à s'en prendre à ces chevaux.

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, deux des plus précieux cadeaux de Noël que j'ai reçus de l'un de mes fils sont des photographies des poneys de l'Île de Sable, qu'il a lui-même prises avec son épouse au cours d'un séjour qu'ils ont effectué, l'été dernier, dans cette magnifique région de notre pays. J'ai promis de m'y rendre cet été pour y découvrir et admirer, pour la première fois, la nature unique de cette région de notre pays.

Il est vrai que le 1er juin dernier, la ministre de l'Environnement du Canada, l'honorable Christine Stewart, et le ministre des Finances et ministre de l'Environnement de la Nouvelle-Écosse, l'honorable Ron Down, ont signé une entente qui lie Environnement Canada, Pêches et Océans Canada et quatre organismes provinciaux. La stratégie de conservation prévue dans l'entente consistera à examiner toutes les utilisations futures possibles de l'île. L'accord contient ce qu'on pourrait appeler un plan directeur éthique concernant la gestion de l'île, qui priorisera la préservation de son relief, de sa flore et de sa faune.

(1430)

L'une des principales recommandations de la stratégie de conservation est de maintenir en permanence une présence humaine sur l'Île de Sable. Toutefois, des études seront effectuées à ce sujet. Si elles démontrent que c'est le cas, les gestionnaires de l'île seront obligés, en vertu de cette stratégie, de mettre au point un plan de gestion afin de minimiser l'impact de la troupe de chevaux sauvages.

Le sénateur Forrestall: Honorables sénateurs, le plan demande la fermeture de la station environnementale qui se trouve sur l'île. Le ministre pourrait-il demander à ses collègues de reconsidérer leur décision? Il a dit, et je suis tout à fait d'accord, que le meilleur moyen de protéger les animaux était de maintenir une présence humaine dans l'île. Cette présence humaine a été assurée plus qu'adéquatement pendant un siècle par les services de protection de l'environnement.

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, si je comprends bien, la stratégie recommande un développement que l'on peut qualifier de lent, mais rigoureusement contrôlé du tourisme afin de protéger la faune, la flore et les propriétés physiques uniques de l'île. Je serai heureux de faire part de la demande de mon honorable collègue à la ministre.

 

Réponses différées à des questions orales

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai la réponse différée à une question que l'honorable sénateur Kelleher a posée le 3 juin 1998 au sujet de l'accord sur le commerce interprovincial et des mesures prises pour réduire le restant des barrières interprovinciales.

 

L'industrie

L'accord sur le commerce interprovincial-Les mesures prises pour réduire le restant des barrières interprovinciales-La position du gouvernement

(Réponse à la question posée par l'honorable James F. Kelleher le 3 juin 1998)

Ceci réfère à un rapport interne qui faisait suite à l'étude que le Conference Board du Canada avait menée en 1992 auprès de cinquante entreprises afin de mieux cerner les facteurs qui viennent gêner leurs échanges interprovinciaux. Comme cette étude n'avait rien d'exhaustif, elle permet tout au plus d'entrevoir les progrès accomplis au niveau de l'élimination des barrières au commerce intérieur.

Cela dit, la situation s'est améliorée depuis janvier 1997. Près de 18 p. 100 des obstacles identifiés par le Conference Board sont maintenant couverts par l'Accord sur le commerce intérieur. Cette augmentation est largement attribuable à diverses mesures prises relativement au commerce agricole.

En outre, la mise en oeuvre de la récente entente sur les achats dans le secteur des municipalités, des établissements d'enseignement et des services de santé et de services sociaux pourrait nous permettre d'éliminer jusqu'à 25 p. 100 des obstacles identifiés par le Conference Board.

Si les négociations visant les achats du côté des sociétés d'État devaient être couronnées de succès, il en résulterait une élimination possible de 36 p. 100 de ces obstacles.

D'autres discussions sont en cours, notamment sur l'harmonisation des normes professionnelles et des règlements sur le camionnage, aux fins d'accroître la mobilité de la main-d'oeuvre. Il pourrait en résulter une possibilité de supprimer jusqu'à 67 p. 100 des obstacles.

L'étude menée par le Conference Board ne couvre pas la totalité des obstacles au commerce interne. Par exemple, aucune des entreprises pressenties lors du sondage n'a mentionné à cet égard les restrictions provinciales en matière de transmission d'électricité. Pourtant, ces restrictions ont des effets négatifs certains sur les échanges interprovinciaux. Prenez le cas de Terre-Neuve; les obstacles de transmission d'énergie démontrent un tel exemple. Une entente est sur le point d'être conclue sur le secteur de l'énergie en général, et sur cette question en particulier. Cette entente fera beaucoup pour notre économie, même si elle ne doit influer d'aucune façon sur les statistiques réunies par le Conference Board.

 


ORDRE DU JOUR

Projet de loi d'exécution du budget de 1998

Troisième lecture

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Bryden, appuyée par l'honorable sénateur Pearson, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-36, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget de 1998, déposé au Parlement le 24 février 1998.

L'honorable P. Michael Pitfield: Honorables sénateurs, bon nombre d'entre nous ici présents participons de temps à autre à des campagnes de financement. C'est le genre de choses que nous sommes de plus en plus appelés à faire. Nous savons que cela exige beaucoup de travail pour recueillir ne serait-ce que quelques centaines de dollars, tout au plus un millier. Toute somme supérieure à mille dollars est difficile à recueillir. Un million de dollars, c'est beaucoup d'argent. Presque un conte de fée. C'est le genre de somme qui provient en général du gouvernement. Mais un milliard de dollars, c'est du sérieux. Cela représente les priorités de toute une communauté. C'est de l'ordre de ce que notre société recherche.

Aussi, il y a quelques mois, quand nous avons eu vent de la proposition du premier ministre de mettre sur pied un fonds du millénaire de cet ordre, il n'est pas étonnant que bon nombre d'entre nous ayons considéré que c'était là une proposition sensée, après les sacrifices et les temps durs qui ont suivi les compressions budgétaires des dernières années.

Je suis persuadé que nous reconnaissons tous à leur juste valeur les conséquences que ce processus de rationalisation a entraînées et que nous savons que ce n'est pas encore fini. À la longue, les compressions pourront être considérées comme ayant été le baiser de la mort pour des orchestres, des bibliothèques, des hôpitaux et des universités d'un bout à l'autre du pays, et ce non seulement en raison du manque de fonds, mais également des répercussions entraînées. Il y a même de fortes chances que le processus ait affaibli de façon permanente l'une de nos plus grandes universités.

Les établissements d'enseignement ne meurent pas d'une seule cause. Comme le disait Aristote, «il faut plusieurs malheurs pour tuer une nation», mais cela arrive. Compte tenu du nombre d'années de déclin que nous avons connues, bon nombre d'établissements d'enseignement canadiens sont menacés ou craignent de devoir bientôt fermer leurs portes et, pour eux, un fonds du millénaire a semblé représenter une planche de salut.

C'était un mirage. Quelles étaient et quelles sont les promesses du gouvernement? Quelle qu'ait été la solution de rechange aux bourses d'études pour les jeunes, elle n'a jamais été formulée. Il n'a pas été nécessaire de chercher longtemps pour trouver quel était le programme du gouvernement. Il semble que, depuis le début, le gouvernement n'avait qu'un seul projet à l'étude, un seul élément de relance en prévision de l'avenir et pas de vision très nette de ce que ce coup de pouce devait produire.

Je regrette de ne pas pouvoir appuyer le projet de loi du gouvernement concernant un programme de bourses d'études soutenu par un fonds du millénaire. Je crois qu'un tel programme est mal conçu, fondé sur une mauvaise politique et presque immoral, du point de vue constitutionnel. Prenons d'abord la question constitutionnelle. Ce projet ne relève tout simplement pas de notre domaine de compétence. Si nous devons nous occuper de l'éducation, nous devrions penser à laisser les provinces s'en charger. Honorables sénateurs, si nous croyons vraiment que l'éducation des jeunes doit être considérée comme une priorité nationale, tâchons de négocier une entente qui laisse le travail aux provinces.

Dans la mesure où nous pouvons présenter des arguments concrets pour la paix, l'ordre et le bon gouvernement, compte tenu de nos antécédents en matière de tempérance et de prohibition, presque tout devient concevable. On peut même justifier l'ingérence du fédéral et défendre cela comme étant du leadership.

Toutefois, assurons-nous d'abord d'avoir établi clairement les priorités quant à ce que notre gouvernement devrait faire. Quelle est notre position concernant nos priorités en matière de santé, de sécurité sociale et de travail? Nous devons ensuite nous assurer que les provinces sont incapables de faire le travail elles-mêmes et même qu'il est peut-être préférable qu'elles ne le fassent pas. La plupart d'entre nous n'avons pas connu autre chose que la situation ultérieure à la commission Rowell-Sirois. Bienvenue dans le nouveau millénaire! Y a-t-il quoi que ce soit de fondamentalement impensable dans un monde où les provinces jouissent d'une certaine autonomie et où les programmes n'ont pas à se développer plus vite que les besoins de manière à maintenir et à justifier un rôle toujours plus important pour le gouvernement fédéral?

(1440)

Si, une fois que tout est fait et dit, nous nous butons à une réalité où les besoins des provinces sont plus importants que les besoins du niveau fédéral, que se passe-t-il si nous n'utilisons pas le pouvoir de dépenser? Comme ce serait un grand pas vers la maturité et la réforme constitutionnelle, et comme ce serait rafraîchissant!

[Français]

L'honorable Roch Bolduc: Honorables sénateurs, je suis heureux d'entendre un esprit indépendant donner sa vision des choses en ce qui concerne le projet de loi C-36. Je voudrais ajouter quelques mots à ce que le sénateur Pitfield vient de dire à ce sujet.

D'abord, je voudrais souligner qu'en deuxième lecture, on avait un peu fait le tour de la question, si bien que mon collègue, le sénateur Bryden, avait même trouvé que notre analyse du projet de loi était bonne. C'est ainsi que j'ai interprété son point de vue.

Ensuite, le comité des finances nationales a entendu ceux qui désiraient témoigner. Les étudiants de la Fédération des étudiants universitaires du Québec représentaient aussi la Coalition québécoise dans ce cas, c'est-à-dire les recteurs d'université, l'Association des professeurs, les syndicats d'enseignants, enfin à peu près tout le monde sauf le gouvernement.

Finalement, on a entendu des représentant du gouvernement à huis clos parce que c'étaient des fonctionnaires. Ils sont venus nous expliquer certains aspects techniques des problèmes que posait l'introduction de cette fondation pour le Québec, qui a déjà un système de bourses.

Finalement, on a entendu notre distingué ministre des Finances qui est venu poliment, gentiment et diplomatiquement nous dire que le cas était entendu et que la réponse était non.

J'ai tiré quatre conclusions de ces audiences. Je ne sais pas si ce sont les mêmes que les vôtres.

Comme le disait le sénateur Pitfield, il s'agit d'une sorte d'accroc au fédéralisme difficilement acceptable en ce moment. Je l'aurais compris il y a 30 ans, il y a 20 ans, quand on se croyait dans l'abondance. Mais il y a deux ou trois ans, le gouvernement nous disait: «Écoutez, on vous promet qu'à l'avenir, on va utiliser le pouvoir de dépenser d'une façon très restreinte, avec discernement.» Or maintenant, le gouvernement a un peu la tête en dehors de l'eau en ce qui concerne les finances publiques, encore qu'on garde une dette de 600 milliards de dollars. C'est beaucoup, surtout quand 150 ou 200 milliards de dollars sont des créances étrangères. Quand les Japonais retirent leurs billes, le dollar canadien descend. Si bien qu'on est dans une situation où, il y a 28 ans, en 1970, le Canada était à 40 p. 100, comme moyenne de richesse nationale, au-dessus de celle de l'OCDE. On est présentement d'un à trois pour cent sous la moyenne de l'OCDE. Cela veut dire que la compétitivité du Canada au niveau international, et par conséquent sa productivité intérieure, n'est pas trop reluisante.

Cela m'apparaît un accroc parce que c'est une façon abusive d'utiliser le pouvoir de dépenser.

Je dois dire que je ne suis pas le seul à penser ainsi. Des esprits aussi indépendants et raisonnables que M. Claude Ryan le pensent aussi. Il a été pendant des années le directeur du journal Le Devoir, la conscience nationale du Québec d'une certaine façon. Il a siégé avec le sénateur Bacon au gouvernement provincial. Il est maintenant à la retraite et il a gardé sa sagesse habituelle. Il dit ceci:

Je m'étonne en troisième lieu de l'attitude adoptée par le gouvernement fédéral dans le dossier des bourses du millénaire. Cette initiative survient dans un domaine où les responsabilités sont exercées depuis longtemps par le Québec et où le Québec a agi et continue d'agir de manière plus importante que toute autre province. Elle témoigne d'une approche qui rappelle le fédéralisme centralisateur des années d'après guerre.

Que le gouvernement fédéral veuille investir plus d'argent dans l'aide aux étudiants alors que Québec accompli déjà un travail fort valable dans ce domaine et que, par ailleurs, le secteur de l'enseignement postsecondaire a été gravement handicapé par la réduction des paiements de transfert fédéraux aux provinces, cela est nettement contradictoire et incohérent.

Voilà un cas où il ne saurait y avoir de doutes quant à la compétence prioritaire du Québec. Le droit de retrait du Québec devrait en conséquence pouvoir s'exercer à l'endroit de ce programme moyennant pleine compensation financière.

Je pense que c'est un accroc au fédéralisme par rapport à ce que j'appelle 35 ans de transfert inconditionnel dans le financement de l'enseignement supérieur. En 1964, il y a eu une entente entre MM. Pearson et Lesage selon laquelle le fédéral n'interviendrait plus pour poser des conditions dans le financement de l'enseignement supérieur.

Cela a été accepté par le Parti libéral à Ottawa, par le Parti conservateur à Ottawa. On a appuyé cette entente à l'époque et on l'appuie toujours.

Qu'est-ce qui se passe? Après 35 ans, on a un changement radical: le fédéral décide que maintenant il y a des conditions. C'est ce qui est grave. On met des conditions dans le financement de l'enseignement supérieur. D'abord on dit que la priorité est l'aide aux étudiants, ce qui n'est pas le cas. Ceux qui connaissent le domaine de l'éducation le savent. On dit qu'il faudrait que la loi fixe telle ou telle condition et que la fondation pourra l'expliciter davantage.

Il est malaisé pour nous d'accepter cela. Il y a une bifurcation qui n'est pas normale.

C'est un accroc aux principes d'action qui viennent d'être définis par le ministre des Affaires intergouvernementales, M. Dion. Il m'a transmis récemment un de ses discours que j'ai bien aimé. Un des principes d'action est que la Constitution doit être respectée. Or ici, je constate qu'elle ne l'est pas. La meilleure des coopérations doit être établie là où cela est nécessaire. Or, il y a eu un effort de transaction entre le fédéral et le provincial et la réponse a été non. Comme Andreï Gromyko, au temps de Staline, Khrouchtchev et Brejnev, chaque fois qu'il venait aux États-Unis, à Paris ou à Londres, et que les Anglais, les Français ou les Américains faisaient des propositions, il répondait toujours: «Nyet.» Cela veut dire qu'il n'y a rien à faire. C'est ce que le gouvernement dit.

La capacité d'action des gouvernements doit être préservée. En faisant cela, c'est le retour aux années où on se croyait riche et où on distribuait de l'argent tous azimuts. La fédération doit être très flexible. Je constate qu'elle est plus que flexible. Le gouvernement fédéral se mêle des politiques provinciales. La fédération doit être équitable. On n'a aucune garantie dans ce projet de loi que les gens de chez nous, qui représentent déjà 25 p. 100 ou 24 p. 100 de la population, vont recevoir l'équivalent de 600 millions de dollars d'ici 10 ans.

L'échange d'information est essentiel. Il n'y en a pas eu. On a reçu une loi sur la tête, celle des bourses canadiennes du millénaire. Le premier ministre la veut et il va l'avoir.

Les contributions respectives des différents gouvernements doivent être connues du public. Dans ce cas, c'est plus que connu du public, disons que c'est vrai. Le ministre a décidé qu'il investirait 250 millions de dollars par année.

Étant donné ces conditions, cette rigidité et le refus d'aller en comité, l'Assemblée nationale a présenté une résolution qu'on a déjà lue ici. Il y est dit que le Québec voudrait avoir une part attribuable à des étudiants répartie sur une base géographique, que le Québec sélectionnerait les étudiants, que les bourses seraient acheminées pour assurer une visibilité au gouvernement fédéral.

M. Dion parle de visibilité, nous n'avons pas d'objection à cela, au contraire. Face à cela, M. Chrétien a écrit à M. Bouchard parce que ce dernier n'a pas beaucoup aimé le ton de cette affaire. Le 27 mai, M. Chrétien répond, et je cite:

L'étude de celles-ci nous amène à conclure qu'il s'agit de positions très valables et positives dont les objectifs rejoignent l'esprit du projet de loi C-36.

(1450) 

Motions d'amendement

L'honorable Roch Bolduc: Honorables sénateurs, en conséquence, je propose, appuyé par le sénateur Rivest, un amendement qui irait dans le sens de la motion de l'Assemblée nationale, que M. Chrétien lui-même trouve raisonnable. Je lis l'amendement, je propose:

[Traduction]

Que le projet de loi C-36 ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit modifié, à l'article 29, page 15:

 

(a) par substitution à la ligne 6, de ce qui suit:

«(2) Par dérogation au paragraphe (1), lorsqu'un ministre provincial donne un avis de trois mois à la fondation de son intention que le présent paragraphe s'applique à cette province en particulier, la fondation est tenue:

a) d'affecter, conformément aux données démographiques, un montant sur ses fonds, pour chacun de ses exercices, à l'octroi de bourses d'études à des résidents de cette province et faire connaître au ministre provincial le montant ainsi affecté;

b) d'adopter les critères d'évaluation du besoin financier et du mérite proposés à la fondation, par le ministre provincial;
c) d'octroyer, sous réserve des dispositions de la présente loi, des bourses d'études à des résidents de cette province que le ministre provincial juge admissibles à recevoir une bourse d'études de la fondation en vertu des critères proposés et adoptés en vertu de l'alinéa b).

(3) Au moment de conclure un accord conformément au paragraphe (1) ou d'administrer les mesures prévues au paragraphe (2), la fondation doit s'assurer que le» .

a) par substitution, au numéro de paragraphe (3), du numéro de paragraphe (4) et par le changement des renvois qui en découle.

Avant de conclure, je tiens à souligner aussi un autre aspect. J'ignore ce qui se passera, mais nous savons que vous, les gens d'en face, êtes majoritaires en cette Chambre. Nous avons fait de notre mieux pour vous convaincre, vous nos collègues sénateurs d'en face, de nos bonnes intentions.

[Français]

Pour donner une dernière chance au gouvernement de procéder à une entente avec Québec et de montrer que le fédéralisme peut fonctionner - c'est mieux de donner des arguments à M. Charest qu'à ses adversaires - on fait une tentative ultime de retarder la mise en vigueur de la fondation pour trois mois. Autrement dit, et ce n'est pas grave, tout ce qu'on demande, c'est trois mois de délai de façon à forcer une négociation entre le gouvernement provincial et la fondation.

Il me semble que ce délai est plus que raisonnable et dans l'intérêt de tous. S'il n'y a pas d'entente, on aura un débat politique dans la province de Québec au mois de septembre ou au mois d'octobre.

Honorables sénateurs, je propose un second amendement, appuyé par mon collègue, le sénateur Rivest:

[Traduction]

Que le projet de loi C-36 ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit modifié, à l'article 133, page 79, par substitution, à la ligne 35, de ce qui suit:

«133. (1) Les articles 2 à 46 entrent en vigueur trois mois après la date de la sanction de la présente loi.

(2) Les articles 127 à 132 entrent en».
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, l'honorable sénateur Bolduc, appuyé par l'honorable sénateur Rivest, propose:

Que le projet de loi C-36 ne soit pas lu maintenant une troisième fois, mais qu'il soit modifié à l'article 29, à la page 15 [...]

Suis-je dispensé d'en faire la lecture?

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Suffit!

Son Honneur le Président: L'honorable sénateur Bolduc, appuyé par l'honorable sénateur Rivest, propose également:

Que le projet de loi C-36 ne soit pas lu maintenant une troisième fois, mais qu'il soit modifié à l'article 133 [...]

Suis-je dispensé d'en faire la lecture?

Le sénateur Carstairs: Suffit!

Son Honneur le Président: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter les motions d'amendement?

Des voix: Non.

Des voix: D'accord.

[Français]

L'honorable Jean-Claude Rivest: Honorables sénateurs, je suis déjà intervenu au sujet du projet de loi C-36 et j'aimerais redire jusqu'à quel point cette question fait l'unanimité au sein de la société québécoise. Au Québec, lorsque l'on fait la lecture de la réalité québécoise, on fait des différences entre fédéralistes et souverainistes, entre anglophones et francophones. Tout le Québec, francophones et anglophones, fédéralistes et souverainistes, s'oppose à ce projet de loi pour des questions de principe qu'on a déjà évoquées en cette Chambre. Les sénateurs Bolduc et Pitfield l'ont rappelé, il s'agit vraiment de la conception même de notre régime fédéral.

Je rappelle aux honorables sénateurs que procéder avec un projet comme celui-là, qui demeure intrinsèquement très important - je vous le répète cela m'apparaît fondamental dans la réflexion même de l'avenir du Canada et du Québec - n'est pas sans conséquences politiques pour un gouvernement majoritaire, qui a le droit légitime de faire fi de l'opinion de la société québécoise et de décider par lui-même et pour lui-même, pour des raisons qui peuvent être valables, de passer outre à la volonté de l'Assemblée nationale. Il a le droit de le faire, démocratiquement ou institutionnellement. Depuis 15 ou 20 ans, ceux qui réfléchissent à l'avenir de notre pays connaissent cette difficulté que nous avons de convaincre et de rassembler l'opinion publique derrière le projet canadien. C'est ce que les Québécois au fond d'eux-mêmes, dans la vaste majorité, veulent.

Qu'est-ce qui contribue à dénigrer l'option canadienne auprès de l'opinion publique québécoise? Je ne parle pas de quelques excités séparatistes. On fait face à un problème politique majeur depuis 15 ou 20 ans.

Il n'y a pas de pire façon de procéder que de constamment encourager les gens qui veulent la destruction de ce pays à placer la société québécoise ou à placer le Canada en porte-à-faux avec ce qui est l'essence même de notre réalité politique canadienne.

Je dois vous rappeler que ce pays existe parce qu'il a une structure fédérative. Une structure fédérative implique un partage de la souveraineté étatique. C'était le projet des Pères de la Confédération.

Ceux qui sont familiers avec l'histoire de ce pays savent qu'une des choses fondamentales qui a amené les Canadiens français de l'époque, qui sont les Québécois d'aujourd'hui, à adhérer au projet canadien, c'était justement ce partage de la souveraineté étatique. Le Québec, les Québécois ou les Canadiens français devaient avoir le contrôle entier de leurs décisions en matière d'éducation.

Cette garantie que les Québécois et les Canadiens français de l'époque ont exigée pour que ce pays existe est l'essence même du projet.

Le Québec a constamment mené cette bataille en matière d'éducation. C'est ce que nous a rappelé d'une façon tellement pertinente le sénateur Bolduc. Ce fédéralisme a été renouvelé d'une façon extraordinairement éclatante par deux hommes de vision. Dans l'histoire du Québec et l'histoire du Canada, Lester B. Pearson et Jean Lesage brilleront toujours au firmament de notre pays.

C'est cela que ces hommes de vision ont fait dans le domaine de l'éducation par cette entente de 1964. Et voilà que pour un caprice de millénaire, on vient mettre en cause ces acquis aujourd'hui en intervenant unilatéralement, sans consultation, sans aucun respect de l'autorité de l'Assemblée nationale, avec un projet de loi qui n'est absolument pas prioritaire, que personne n'a demandé. Le mandat des sénateurs est de défendre les institution fédératives. Pour faire plaisir à l'honorable premier ministre du Canada avant sa retraite, on nous demande d'appuyer ce projet de loi.

Au Québec, on regrette, dans le fonctionnement de notre régime fédéral, ces actions unilatérales qui sont constamment prises au mépris de l'Assemblée nationale du Québec.

Au Québec, je tiens à le dire et à le répéter, il est faux de dire que lorsque nous nous objectons à un programme du gouvernement fédéral qui nous concerne, nous sommes séparatistes, nationalistes ou anticanadiens. Nous respectons l'autorité du pays ainsi que l'autorité de la Constitution du pays.

(1500)

Honorables sénateurs, je veux simplement vous signaler que la conséquence politique n'est pas neutre. Ce n'était pas neutre en 1982 de rapatrier la Constitution du pays sans le consentement de l'Assemblée nationale. Ce n'était pas neutre de saboter l'Accord du lac Meech. Ce n'est pas neutre non plus de contrer aujourd'hui la volonté de l'Assemblée nationale dans le domaine de l'éducation. Il me semble que si nous croyons en l'avenir de notre pays, nous devons avoir un minimum de décence, de réflexion et de sens des responsabilités afin de respecter cette réalité de notre pays.

L'honorable Serge Joyal: Honorables sénateurs, j'ai le privilège aujourd'hui de m'adresser à vous sur cette question qui touche grandement nos collègues du Québec. Je voudrais porter à votre attention un certain nombre d'éléments.

Je voudrais affirmer que le fédéralisme peut marcher au Québec et au Canada. Non, ce projet de loi n'est pas un accroc à la Constitution de notre pays, et non, il ne dévalue pas l'option canadienne. Pour ce faire, j'apporterai à votre attention un certain nombre de faits.

Le premier de ces faits réfère à l'objectif même que ce projet de loi cherche à satisfaire: les dispositions relatives aux bourses du millénaire. L'endettement des étudiants au Canada n'est pas un phénomène créé par l'actuel premier ministre du Canada. L'endettement des étudiants est une réalité qui a été constatée par les ministres de l'Éducation du Canada au mois de septembre dernier lors de leur réunion régulière. Ces ministres tiennent de façon continue ces réunions pour constater les besoins du régime d'éducation au Canada. Ils ont demandé en septembre 1997, au gouvernement fédéral, de mettre en oeuvre des mesures visant à réduire l'endettement étudiant le plus rapidement possible. Ce n'est pas le premier ministre du Canada qui assistait à ces réunions des ministres de l'Éducation.

Lors de leur rencontre annuelle, les premiers ministres des provinces et le premier ministre du Canada, le 12 décembre 1997, dans leur communiqué final de rencontre, ont souligné d'une façon pressante le besoin de faire face à la dette étudiante au Canada. Je me permettrai de citer le communiqué de presse de clôture puisque, encore une fois, ce n'est pas l'actuel premier ministre du Canada qui, unilatéralement, a décidé d'inclure ce paragraphe dans le communiqué de clôture. Je cite le communiqué:

Les premiers ministres se sont entendus sur l'importance de diminuer le fardeau financier des étudiants. Ils ont également accepté que le ministre des Finances et le ministre du Développement des ressources humaines travaillent de façon accélérée et de concert avec les premiers ministres des provinces et des Territoires de sorte que le ministre des Finances puisse prendre en considération ce travail dans le prochain budget du gouvernement du Canada.

Si, par ailleurs, les honorables sénateurs veulent se souvenir des débats entourant la dernière campagne électorale, je leur citerai le livre bleu d'un gouvernement Charest. Je voudrais le souligner, certains des honorables sénateurs de l'autre côté peuvent ne pas être d'accord, et je le reconnais, mais la majorité d'entre vous avez appuyé ce livre bleu. Je vais citer ce qu'il y a dans ce livre bleu à la page 33, sous le chapitre «Haut savoir, recherche et technologie»:

L'avènement d'une économie de l'information faisant appel à des compétences spécialisées transforme le marché de travail. Les emplois de demain exigeront presque tous une formation dépassant le niveau secondaire et nous forcent à adopter une culture fondée sur l'éducation permanente.

Et, écoutez bien, je cite:

Un gouvernement Charest permettra à plus d'étudiants de joindre les rangs collégiaux et universitaires:

Et comment?

En affectant 100 millions $ à un programme de bourses d'excellence, qui ouvrira les portes des études supérieures à 25 000 étudiants démunis qui auront obtenu les meilleures notes lors d'un examen couvrant des matières obligatoires;

en collaborant avec les provinces intéressées à la mise sur pied [...]
Votre Honneur, nous ne sommes pas à la Chambre des communes, nous sommes au Sénat, et j'espère bien que mes honorables collègues se comporteront comme des sénateurs et non pas comme certains personnages dans l'autre Chambre. Et je continue la citation:

en collaborant avec les provinces intéressées à la mise sur pied de programmes universels d'aide aux étudiants financés par le secteur privé. Tous les étudiants auront droit à cette aide et rembourseront leurs prêts après avoir obtenu leur diplôme, suivant des modalités établies en fonction de leur revenu personnel;

Lorsqu'on nous dit que le problème de l'endettement des étudiants est une création du premier ministre du Canada, je vous soumets, honorables sénateurs, qu'il y a des nuances. Les ministres de l'Éducation, les premiers ministres du Canada, le parti représenté de l'autre côté de la Chambre, ce parti-ci, nous nous mettons d'accord pour reconnaître qu'il y a un problème d'endettement des étudiants.

Pour vous le rappeler, je voudrais vous citer certains chiffres. La dette moyenne des étudiants au Canada est d'environ 18 000 $ par étudiant. La province où la dette est la plus élevée, malheureusement, est la Nouvelle-Écosse, 24 818 $; la seconde province où la dette est la plus élevée, cela vous surprendra, est la Saskatchewan, 23 700 $. On parle d'une province dirigée par un gouvernement dont l'objectif est censé, au premier chef, promouvoir l'égalité des chances. Les trois provinces les plus riches du pays, la Colombie-Britannique, l'Alberta et l'Ontario, environ 17 500 $. La province qui présente une fiche, je dirais, plus favorable, le Québec, a un endettement moyen de 11 227 $.

Cependant, ces chiffres doivent être tempérés. Si on regarde le nombre des étudiants qui doivent maintenant s'endetter dans chaque province, c'est malheureusement le Québec qui a le plus haut pourcentage, avec 232 052 étudiants sur un ensemble total de 617 206 étudiants au Canada. C'est donc dire que les étudiants au Québec, en proportion, s'endettent davantage que la moyenne des étudiants au Canada, ce qui ne fait qu'illustrer davantage le besoin de prendre des mesures pour faire face à l'endettement des étudiants.

Quelles mesures devrions-nous prendre? Est-ce que ce gouvernement fédéral est fondé de dépenser dans le secteur de l'éducation? C'est une question que nous avons entendue de l'autre côté de la Chambre et qui a été soulevée à plusieurs reprises lors des audiences de ce comité.

Laissez-moi vous rappeler que le gouvernement canadien a le pouvoir de dépenser. Mon honorable collègue, le sénateur Beaudoin, l'a très bien expliqué dans ses propos à cette Chambre. Le pouvoir de dépenser du gouvernement canadien est une réalité constitutionnelle que les plus hauts tribunaux de notre pays ont constatée à maintes reprises. Il y ont mis cependant une limite constitutionnelle. Cette limite, l'honorable juge Sopinka, dans la cause du Renvoi: Régime d'assistance sociale du Canada, l'a très bien expliquée. L'honorable sénateur Beaudoin lui-même y a fait allusion dans son discours, et je cite le passage du jugement du juge Sopinka en date de 1991. Le juge Sopinka dit, et je cite:

Suivant l'argument écrit avancé par le procureur général du Manitoba, la loi en cause «revient à» réglementer un domaine qui ne relève pas de la compétence fédérale.

Le simple refus de verser des fonds fédéraux jusque-là accordés pour financer une matière relevant de la compétence provinciale ne revient pas à réglementer cette matière.

(1510)

C'est la limite la plus directe, la plus immédiate de l'exercice du pouvoir fédéral de dépenser, une loi qui aurait pour effet de réglementer un secteur qui n'est pas de juridiction fédérale.

Il m'est avis que le projet de loi dont nous sommes saisis ne réglemente pas les frais de scolarité et les éléments des programmes où devraient s'inscrire les étudiants réguliers. C'est une mesure égale qui s'adresse à l'ensemble des étudiants dans le besoin.

Honorables sénateurs, ce pouvoir de dépenser n'est pas le spectre que l'on veut bien agiter constamment au-dessus de nos têtes. Il existe aussi à la faveur des provinces. Nous n'en parlons jamais, c'est probablement la réalité constitutionnelle la plus cachée au Canada.

Les provinces ont le pouvoir de dépenser dans des secteurs de juridiction qui ne sont pas les leurs. Ce n'est pas moi qui le dit, c'est un jugement de la Cour suprême du Canada rendu en 1984 dans la cause Dunbar c. Attorney General of Saskatchewan.

Je voudrais vous lire ce passage parce que les provinces ont dépensé dans le passé dans plusieurs domaines qui ne sont pas de leur juridiction, et l'honorable juge l'a très bien souligné. Elles ont dépensé pour opérer des lignes aériennes interprovinciales; dans le domaine international pour appuyer l'aide aux pays en voie de développement; elles dépensent depuis le début de la Confédération canadienne dans le domaine des affaires internationales pour assurer la représentation de leurs intérêts à l'étranger. Elles dépensent dans le domaine du commerce interprovincial. Il y a une série de dépenses données par cet honorable juge et je prierais mes honorables collègues de garder cette réalité en tête.

Pourquoi existe-t-elle? Elle existe parce que nous reconnaissons dans notre droit constitutionnel qu'un gouvernement, pour exercer pleinement ses responsabilités exclusives, peut avoir comme initiative des projets, des règlements, des lois qui ont pour effet de donner une certaine extension au-delà de ses limites propres pour donner effet à des jugements politiques qu'il pose dans des circonstances données.

Je ne remets pas en cause le pouvoir de dépenser des provinces. Au contraire, je crois que c'est un excellent pouvoir dont elles disposent, issu de la prérogative royale et de la convention dans notre pays.

Ceci dit, je voudrais ajouter un élément essentiel dans ce débat. Nous disons que l'éducation est un domaine de juridiction provinciale exclusive. J'ai entendu mes honorables collègues de l'autre côté le mentionner.

Je voudrais leur rappeler que certains d'entre eux ont la mémoire courte. En effet, nous venons d'adopter, il y a quelques semaines, un excellent rapport sénatorial sur l'enseignement postsecondaire au Canada. Un groupe de savants sénateurs dans cette Chambre, présidé par l'honorable sénateur Bonnell, assisté par l'honorable sénateur Thérèse Lavoie-Roux, a publié un excellent rapport en décembre 1997. Nous avons adopté ce rapport.

Que dit ce rapport à la page 67? Je pense qu'il faudrait le relire. Je vais vous relire un extrait qui, à mon avis, reconnaît bien la délicatesse du sujet que nous abordons mais aussi le fait que nous ne sommes pas sur un terrain qui n'est pas de notre compétence. Je cite:

 

Le comité spécial recommande:
[...] que le gouvernement fédéral crée un mécanisme lui permettant de mieux jouer son rôle dans le domaine de l'enseignement postsecondaire.
C'est écrit en caractère gras. Je vais vous lire quels sont les rôles du gouvernement fédéral dans l'enseignement postsecondaire ainsi que constatés par les honorables sénateurs dont le sénateur Lavoie-Roux, qui a pris part à ce débat, et je cite:

amorcer des mesures de coopération avec le Conseil des ministres de l'Éducation (Canada) afin de résoudre des problèmes et marquer des progrès dans les aspects de l'enseignement postsecondaire qui relèvent à la fois de la compétence fédérale et provinciale (p. ex. mobilité interprovinciale, équité d'accès à l'échelle nationale, aide financière aux étudiants, mesures d'adaptation pour les personnes handicapées, services de statistique et exploitation des technologies de l'information);

Ceux qui disent que le gouvernement canadien n'a pas d'affaire dans le domaine de l'éducation, à mon avis, ne reconnaissent pas la réalité telle que nous l'avons vécue et telle qu'elle s'est développée. Je vais vous parler de cette réalité.

J'ai eu l'occasion, dans ma jeune vie d'étudiant, d'être le premier président de la Fédération des étudiants des collèges classiques du Québec en 1962, il y a 36 ans. Nous étions, pour la première fois, un regroupement des associations des étudiants de tous les collèges classiques privés au Québec et nous visions deux objectifs. Le premier, l'accessibilité de l'éducation, c'est-à-dire nous assurer que l'éducation ne soit pas le privilège des mieux nantis ou de ceux qui pouvaient trouver les moyens d'en assumer le coût. Le deuxième, d'avoir un secteur public, c'est-à-dire que tous les niveaux de l'éducation devaient être également accessibles à tous les étudiants.

Où en sommes-nous, 36 ans plus tard? Nous constatons que les ministres de l'Éducation et les premiers ministres de ce pays reconnaissent que l'endettement des étudiants au pays a atteint un niveau intolérable, et que si nous n'y faisons pas face d'une façon efficace et immédiate, c'est la carrière même de ces étudiants qui s'en trouve compromise comme jeunes professionnels, jeunes travailleurs.

J'ai eu le privilège, dans l'autre Chambre, d'être secrétaire d'État du Canada. Dans le domaine de l'enseignement, j'ai pris l'initiative de mettre sur pied le réseau des centres d'excellence au Canada en 1982. Qu'est-ce que c'était, ce réseau des centres d'excellence? Cette initiative devait mettre à la disposition des universités au pays les moyens financiers pour se spécialiser dans des domaines de recherche, dans des domaines d'application qui avaient un avenir par rapport à la réalité régionale de chacune des provinces.

Où en sommes-nous aujourd'hui, 16 ans plus tard? Nous avons un réseau des centres d'excellence où la majorité des universités canadiennes participent à l'intérieur de leurs propres ressources universitaires, à un des domaines qui est le plus prometteur pour l'avenir de la recherche et de la création d'emploi au pays.

Honorables sénateurs, je vous rappellerai que j'ai été crucifié sur la place publique en 1982 parce que j'intervenais dans un domaine de juridiction exclusive, entre guillemets, de la compétence des provinces.

Son Honneur le Président: Je dois vous interrompre, car la période allouée est terminée. Est-ce que la permission de continuer est accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Joyal: Ce programme qui, à mon avis, s'intégrait parfaitement dans les responsabilités du gouvernement canadien, visait en définitive à redistribuer une partie de la richesse nationale de sorte que les universités, par leurs ministres de l'Éducation, puissent convenir d'une entente avec le gouvernement canadien. Elles décidaient elles-mêmes quelles étaient les universités qui participeraient au programme, quels seraient les critères d'admissibilité, les chercheurs qui participeraient, quelles initiatives elles prendraient pour développer ces programmes. Je n'en avais rien à faire. Tout ce qui m'importait, comme ministre canadien, était de m'assurer que des fonds soient mis à la disposition des provinces pour qu'elles puissent faire face au besoin de la concurrence de recherche pour éviter ce que nous appelons toujours et ce qui nous confronte toujours comme étant le «brain drain», c'est-à-dire le départ des cerveaux du Canada vers les centres de recherche américains. C'était la responsabilité que j'estimais avoir comme secrétaire d'État du Canada.

Qu'avons nous aujourd'hui? Nous sommes devant une situation où l'endettement des étudiants est une urgence quasi nationale. Nous avons une série de témoins qui ont comparu devant nous. Ils ont demandé en fait d'en arriver le plus rapidement possible à une entente négociée avec le gouvernement du Québec. Je sais que plusieurs de mes collègues de l'autre côté partagent cet objectif. Nous essayons de faire en sorte que ces fonds prévus dans le projet de loi C-36 atteignent les étudiants.

Malheureusement, nous n'avons pas cette garantie que ces fonds vont atteindre les étudiants. Je l'ai dit au début des audiences de notre comité. Les représentants des étudiants que j'ai rencontrés cette semaine m'ont remis une lettre signée par la ministre de l'Éducation du Québec, qui reconnaît bien que certains des fonds seraient dirigés vers les étudiants, mais d'autres seraient dirigés ailleurs, et je cite la lettre:

(1520)

Comme vous le savez, nous nous sommes engagés à utiliser les fonds que le fédéral veut consacrer à la Fondation canadienne des bourses d'étude du millénaire pour recommencer à investir dans l'éducation postsecondaire, notamment, pour améliorer le régime financier d'aide aux étudiants afin de réduire l'endettement au Québec.

Vous comprenez aussi que les efforts budgétaires des dernières années ont obligé les institutions à plusieurs sacrifices. Devant ces faits, il va de soi que nous devons investir dans nos institutions collégiales et universitaires et qu'à cet égard, la récupération des fonds du millénaire nous procurera la marge de manoeuvre pour mieux répondre aux exigences relatives à la progression du Québec dans les secteurs de l'économie du savoir.

Qu'est-ce que cela veut dire? Si on transfère les fonds à la province tels quels, le gouvernement du Québec nous dit qu'une partie ira aux étudiants, mais qu'une autre partie ira dans le système.

Nous soumettons que les besoins existent dans le système et le ministre des Finances les reconnaît puisqu'il a annoncé, dans le même budget, 300 millions de dollars de plus en subventions pour la recherche. Il a, l'an dernier, pris des initiatives pour mettre à la disposition des universités 400 millions de dollars pour une fondation pour l'innovation, qui vise précisément l'aide au secteur de l'éducation.

L'Assemblée nationale du Québec a adopté une résolution qui m'apparaît extrêmement sensée. Elle vise trois objectifs. Le premier est que l'on identifie globalement les montants que le Québec pourrait recevoir à l'intérieur de ce budget. Or, l'article 5.(2) du projet de loi prévoit précisément que les sommes d'argent dégagées par la fondation devraient servir d'une manière juste et équitable à travers le Canada, et je cite l'article 5.(2) du projet de loi:

La fondation accorde les bourses d'études, de façon juste et équitable, à travers le Canada.

Si on regarde le passé du gouvernement canadien dans l'octroi des fonds, le Québec a toujours eu plus que sa part dans le domaine de l'enseignement postsecondaire. Si je pouvais vous donner les statistiques de chacun des programmes auxquels j'ai fait référence, la majorité dépasse les 24 ou 25 p. 100 de la population du Québec.

Le deuxième élément de la résolution de l'Assemblée nationale est que le choix des étudiants doit être fait par le gouvernement du Québec. Il n'y a pas, à mon avis, d'incompatibilité à ce que les critères mis en place par le gouvernement du Québec, qui s'est doté d'un système avantageux de prêts et bourses, soient respectés et reconnus par la Fondation canadienne des bourses du millénaire.

Enfin, le troisième point de cette résolution de l'Assemblée nationale est extrêmement important. Il consiste à ce que les bourses soient acheminées aux récipiendaires de manière à éviter les dédoublements. C'est un des éléments clés du fonctionnement de cette fondation. Il faut éviter que l'on en arrive à une situation où le gaspillage des fonds publics devienne l'une des marques de commerce de la fondation. Je crois que la seule façon d'y parvenir serait que les parties retournent à la table des négociations.

Dans sa lettre du 15 mai, le premier ministre du Québec a préféré mettre un terme aux négociations plutôt que d'honorer les engagements du calendrier qui étaient déjà convenus entre les négociateurs. Si nous avons un plaidoyer à faire aujourd'hui, c'est que nous prions instamment les deux parties, que ce soit les représentants du gouvernement canadien ou ceux du gouvernement du Québec, de retourner à la table des négociations. Il n'y a pas une solution que des personnes raisonnables ne puissent définir et ajuster, si on tient compte de la façon dont la coordination s'est faite dans le passé dans ce secteur névralgique, sensible, mais néanmoins essentiel au fonctionnement de ce pays.

L'honorable Thérèse Lavoie-Roux: Honorables sénateurs, je ne prendrai pas autant de temps que ceux qui m'ont précédée et qui d'ailleurs ont été fort éloquents, qu'il s'agisse du sénateur Bolduc, du sénateur Rivest ou du sénateur Joyal.

Je dois dire au départ que je suis tout à fait d'accord avec l'analyse qu'ils font de l'intrusion du gouvernement fédéral dans un domaine qui est totalement de compétence provinciale.

Les sénateurs qui viennent du Québec savent comment l'éducation est un domaine de compétence sacré pour le Québec. D'ailleurs, je pense que le sénateur Pitfield l'a aussi signalé en disant qu'on entrait dans un problème constitutionnel qui ne semble pas avoir d'écho du côté du gouvernement.

Quand le sénateur Joyal nous dit que le rapport sur l'enseignement postsecondaire du comité spécial du Sénat a noté, avec raison d'ailleurs, le sous-financement des étudiants et l'endettement des étudiants, c'est absolument vrai. Mais il y avait une province où les gens avaient fait leurs devoirs, et c'est le Québec. Comme l'a dit à quelques reprises le sénateur Bolduc, le Québec a son système de prêts et bourses que les autres provinces n'ont pas.

Les étudiants de la Nouvelle-Écosse n'avaient pas de système des prêts et bourses et ils ont subi, année après année, des hausses de frais de scolarité alors que le Québec n'en a pas subies. Si on compare la situation du Québec à celle des autres provinces, on retrouve des similarités, mais ce n'est pas le fond du problème.

On a noté que les problèmes de financement de l'éducation sont encore plus aigus quant à la qualité de l'enseignement et à l'appui donné à la recherche dans les universités. On a eu des témoignages de partout, de différents niveaux. Au Québec, ce sont les cégeps et dans les autres provinces, les collèges. On a appris comment les ressources qu'avaient à leur disposition les professeurs et les administrations des universités au point de vue équipement, et cetera, étaient vraiment déficientes à cause du sous-financement de l'enseignement, dont une grande partie est due à la diminution considérable des transferts fédéraux à l'égard de l'éducation. C'est la réalité.

Le Québec dit qu'il fait beaucoup d'efforts dans ce domaine et qu'il a des besoins criants au niveau de la qualité de l'enseignement dans les universités, au niveau de la formation, de la «surspécialisation» des professeurs, de l'équipement à mettre en place. On voudrait être en mesure, compte tenu de notre situation particulière - et j'oublie l'aspect constitutionnel - de disposer de cet argent selon les vraies priorités du Québec.

Je voudrais simplement dire à mes collègues de l'autre côté qu'hier, j'ai été un peu méchante. Je leur ai dit qu'ils souffraient du syndrome de l'hépatite C.

On a proposé des amendements, probablement une quinzaine. Je vais en mentionner deux qui étaient vraiment sans conséquences graves pour ce projet de loi. Il faut quand même admettre que les étudiants ont déployé beaucoup d'efforts pour faire valoir leur point de vue. Ils avaient demandé qu'il y ait deux étudiants au lieu d'un sur les 15 membres du conseil de la fondation. J'ai proposé un amendement pour qu'il y en ait deux. On a répondu non. Cela a été le comportement de nos amis d'en face.

(1530)

Les étudiants et les professeurs d'université demandaient que le programme puisse s'appliquer non seulement aux études de premier cycle universitaire, mais aussi à la maîtrise et au doctorat. J'ai mentionné aux étudiants qu'ils ont souvent la possibilité de recevoir des subventions de firmes pharmacologiques ou autres. Aujourd'hui, si vous avez un diplôme de premier cycle, dans la plupart des cas, il vous en faut un de deuxième cycle pour vraiment y arriver. J'ai proposé qu'on étende cela au deuxième cycle. On a répondu non. Quand vous voyez cette attitude, même si je reconnais qu'il y avait peut-être un petit peu de méchanceté dans ce que j'ai dit, je trouvais que cela collait pas mal à la réalité qu'on vivait.

Je suis convaincue qu'il y a des gens du Québec et d'autres provinces qui partagent mon point de vue quant au partage des responsabilités, surtout quant aux conséquences que ceci aura au Québec. Il y a eu une telle unanimité pour dire que ce n'était pas la façon de procéder. Le sénateur Bolduc a proposé deux amendements. Considérez que, sans mettre en péril une loi qui touche l'ensemble du budget, sans mettre en péril non plus les bourses du millénaire, il serait utile qu'on ait un peu plus de temps pour examiner la question pour s'entendre sur des modalités qui n'empêcheraient pas le gouvernement fédéral d'agir, mais qui permettraient au Québec, à cause des considérations que j'ai mentionnées, d'avoir un peu plus de latitude.

Je vous demande, honorables sénateurs, que je salue avec beaucoup de respect, de prendre en considération tous les arguments que mes collègues ont probablement fait valoir d'une façon plus éloquente que je ne le fais.

L'honorable Gérald-A. Beaudoin: Honorables sénateurs, j'aimerais ajouter quelques mots parce que le sénateur Joyal a référé à ce que j'ai dit en comité. Il est exact qu'il y a au Canada un pouvoir fédéral de dépenser. Il est exact qu'il y a un pouvoir provincial de dépenser. Mais la difficulté d'exercice du pouvoir fédéral de dépenser est la suivante: si la dépense entre en conflit avec une priorité provinciale, le pouvoir de dépenser donne toujours lieu à de grands débats. J'ai dit en comité, je le répète ici, qu'il faut résoudre ce problème. Que ce soit à la faveur d'un amendement, comme le propose mon collègue, ou que ce soit la solution que j'ai élaborée en comité, à savoir un arrangement administratif, je pense qu'il faut faire quelque chose.

On n'a qu'à lire les archives constitutionnelles. M. Trudeau s'est penché là-dessus, le juge Jean Beetz, avant d'être à la Cour suprême, s'est penché là-dessus. On est toujours arrivé soit à un compromis, soit à un arrangement administratif ou encore à un amendement.

Je voulais tout simplement rétablir les faits. C'est très clair dans mon esprit. Mais s'il y a un conflit dans l'exercice du pouvoir de dépenser, il faut tout faire pour arriver à un arrangement administratif. C'est le fédéralisme.

[Traduction]

L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, j'ai écouté de merveilleux discours sur cette question, mais certains points continuent de ressortir. Il s'agit de la pertinence de cette institution et, aussi, de la prédiction de certains experts au sujet de l'avenir de Jean Charest qui a décidé, au prix d'un grand sacrifice personnel, de prendre la tête des libéraux du Québec dans le combat qui pourrait sauver le pays.

Les experts ont dit que Jean Charest aurait à lutter non seulement contre Lucien Bouchard, mais encore contre les initiatives du gouvernement ayant pour effet de miner son autorité ou, à tout le moins, sa capacité de battre Lucien Bouchard. Cela semble certainement être le cas dans le présent débat.

Le premier point a trait à la pertinence de cette institution. Nous avons éloquemment discuté de cette dernière et de ce qu'elle représente. Le Sénat avait initialement pour mandat de défendre les intérêts des régions. Certains d'entre vous n'aiment peut-être pas le premier amendement du sénateur Bolduc, cependant, le deuxième prévoit un report de 90 jours. Ce n'est pas la fin du monde. Notre fonction n'est-elle pas de défendre les intérêts des régions? Comme je l'ai dit dans le passé, nous n'avons pas assumé cette responsabilité, à mon avis.

Ne chargeons pas Jean Charest d'une autre croix. Ne refusons pas encore une fois notre responsabilité. Acceptons à tout le moins le deuxième amendement du sénateur Bolduc, qui recommande d'attendre 90 jours. Après quoi, si une entente n'est pas conclue, le projet de loi deviendra loi.

[Français]

L'honorable Jean-Maurice Simard: Honorables sénateurs, je désire appuyer les propos et les arguments des sénateurs conservateurs du Québec. Il ne sont pas reconnus pour leur partisanerie. Je mentionne le sénateur Bolduc, le sénateur Rivest, le sénateur Beaudoin et le sénateur Lavoie-Roux. J'appuie sans réserve, sans ambiguïté, leurs propos et leurs arguments en faveur de la motion d'amendement.

Honorables sénateurs, je propose, appuyé par le sénateur Grimard, que le Sénat consente au dépôt du document du ministre Dion.

Son Honneur le Président: Je regrette, il y a déjà deux motions d'amendement devant nous. Je ne peux pas permettre d'en présenter une troisième jusqu'à ce que l'on dispose d'au moins une de ces motions.

S'il n'y a pas d'autres discours, je vais poser la question.

[Traduction]

Honorables sénateurs, si personne d'autre ne veut prendre la parole, nous devons nous prononcer sur la motion de l'honorable sénateur Bryden, appuyé par l'honorable sénateur Pearson, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-36, et sur la motion d'amendement no 1 de l'honorable sénateur Bolduc, appuyé par l'honorable sénateur Kinsella, qui propose:

Que le projet de loi C-36 ne soit pas lu maintenant une troisième fois, mais qu'il soit modifié à l'article 29, à la page 15...

Dois-je continuer?

Des voix: Suffit!

Son Honneur le Président: Le vote porte aussi sur la motion d'amendement no 2 de l'honorable sénateur Bolduc, appuyé par l'honorable sénateur Rivest, qui propose:

Que le projet de loi C-36 ne soit pas lu maintenant une troisième fois...

Dois-je continuer?

Des voix: Suffit!

Son Honneur le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion d'amendement no 1 veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Son Honneur le Président: Que tous ceux qui sont contre la motion d'amendement no 1 veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Son Honneur le Président: À mon avis, les non l'emportent.

Et deux sénateurs s'étant levés.

Son Honneur le Président: Convoquez les sénateurs.

Honorables sénateurs, les whips me signalent qu'ils veulent que le timbre se fasse entendre pendant 25 minutes. Le vote aura lieu à 16 h 05.

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, le Sénat doit se prononcer sur la motion d'amendement no 1, proposée par l'honorable sénateur Bolduc.

(La motion d'amendement no 1, mise aux voix, est rejetée.)

 

POUR
LES HONORABLES SÉNATEURS

Atkins, Beaudoin, Berntson, Bolduc, Buchanan, Cochrane, Cohen, Comeau, DeWare, Di Nino, Doody, Forrestall, Ghitter, Grimard, Gustafson, Johnson, Kelleher, Kelly, Keon, Kinsella, Lavoie-Roux, LeBreton, Lynch-Staunton, Murray, Nolin, Oliver, Phillips, Rivest, Roberge, Rossiter, Simard, St. Germain, Stratton, Tkachuk-34 

CONTRE
LES HONORABLES SÉNATEURS

Adams, Bacon, Bryden, Butts, Callbeck, Carstairs, Chalifoux, Cook, Cools, Corbin, Fairbairn, Ferretti Barth, Fitzpatrick, Forest, Gigantès, Grafstein, Graham, Hays, Hébert, Hervieux-Payette, Johnstone, Joyal, Kenny, Kirby, Kolber, Kroft, Lawson, Lewis, Losier-Cool, Maheu, Mahovlich, Maloney, Mercier, Milne, Moore, Pearson, Pépin, Perrault, Poulin, Robichaud (L'Acadie-Acadia), Robichaud (Saint-Louis-de-Kent), Rompkey, Ruck, Sparrow, Stewart, Taylor, Watt, Wilson-48 

ABSTENTIONS
LES HONORABLES SÉNATEURS

Prud'homme-1

 

(1610)

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, vous êtes appelés à vous prononcer sur la motion d'amendement no 2 du sénateur Bolduc:

Que le projet de loi C-36 ne soit pas lu une troisième fois maintenant...

Une voix: Suffit!

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, voulez-vous un vote par appel nominal ou voulez-vous faire inscrire au compte rendu que nous utilisons le résultat du vote précédent?

L'honorable Mabel M. DeWare: Honorables sénateurs, les sénateurs de l'opposition voudraient que l'on reprenne le résultat du vote précédent.

Le sénateur Carstairs: Nous sommes d'accord.

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, s'il y avait un vote, je voterais cette fois contre le report de 90 jours du projet de loi.

Son Honneur le Président: Nous devons donc voter, car le résultat sera différent de celui du vote précédent.

Le sénateur Prud'homme: Votre Honneur, je ne veux pas forcer le Sénat à voter à nouveau. S'il y a une seule voix de différence, il suffit de soustraire un d'un côté et d'ajouter un de l'autre côté, comme cela se fait souvent, mais je ne voudrais pas modifier le Règlement du Sénat du Canada.

Son Honneur le Président: Je crois que le Règlement exige qu'il y ait un vote.

Le sénateur Prud'homme: Dans ce cas, je m'abstiendrai à nouveau.

Son Honneur le Président: Je répète ma question. Acceptez-vous que nous utilisions le résultat du vote précédent pour la motion d'amendement no 2?

Des voix: D'accord.

(La motion d'amendement no 2, mise aux voix, est rejetée.)

 

POUR
LES HONORABLES SÉNATEURS

Atkins, Beaudoin, Berntson, Bolduc, Buchanan, Cochrane, Cohen, Comeau, DeWare, Di Nino, Doody, Forrestall, Ghitter, Grimard, Gustafson, Johnson, Kelleher, Kelly, Keon, Kinsella, Lavoie-Roux, LeBreton, Lynch-Staunton, Murray, 
Nolin, Oliver, Phillips, Rivest, Roberge, Rossiter, Simard, St. Germain, Stratton, Tkachuk-34

CONTRE
LES HONORABLES SÉNATEURS

Adams, Bacon, Bryden, Butts, Callbeck, Carstairs, Chalifoux, Cook, Cools, Corbin, Fairbairn, Ferretti Barth, Fitzpatrick, Forest, Gigantès, Grafstein, Graham, Hays, Hébert, Hervieux-Payette, Johnstone, Joyal, Kenny, Kirby, Kolber, Kroft, Lawson, Lewis, Losier-Cool, Maheu, Mahovlich, Maloney, Mercier, Milne, Moore, Pearson, Pépin, Perrault, Poulin, Robichaud (L'Acadie-Acadia), Robichaud (Saint-Louis-de-Kent), Rompkey, Ruck, Sparrow, Stewart, Taylor, Watt, Wilson-48 

ABSTENTIONS
L'HONORABLE SÉNATEUR

Prud'homme-1

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, nous reprenons la motion principale. Il est proposé par l'honorable sénateur Bryden, appuyé par l'honorable sénateur Pearson, que le projet de loi soit lu une troisième fois. Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Le sénateur DeWare: Que le compte rendu indique que nous reprenons le même résultat.

Le sénateur Carstairs: D'accord.

Le sénateur Prud'homme: Honorables sénateurs, je suis désolé. Je me suis abstenu lors du premier vote. J'étais prêt à voter du côté du gouvernement pour le second vote, mais non à forcer la tenue d'un vote. Cependant, sur cette question, je ne peux m'abstenir. Je voterai en faveur du projet de loi.

Son Honneur le Président: L'autre solution consiste à dire simplement «avec dissidence».

Des voix: Un vote par appel nominal.

Le sénateur DeWare: L'opposition est d'accord pour tenir un vote par appel nominal maintenant, sans sonnerie d'appel.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté.)

 

POUR
LES HONORABLES SÉNATEURS

Adams, Bacon, Bryden, Butts, Callbeck, Carstairs, Chalifoux, Cook, Cools, Corbin, 
Fairbairn, Ferretti Barth, Fitzpatrick, Forest, Gigantès, Grafstein, Graham, Hays, Hébert, Hervieux-Payette, Johnstone, Joyal, Kenny, Kirby, Kolber, Kroft, Lawson, 
Lewis, Losier-Cool, Maheu, Mahovlich, Maloney, Mercier, Milne, Moore, Pearson, Pépin, Perrault, Poulin, Prud'homme, Robichaud (L'Acadie-Acadia), Robichaud (Saint-Louis-de-Kent), Rompkey, Ruck, Sparrow, Stewart, Taylor, Watt, Wilson-49 

CONTRE
LES HONORABLES SÉNATEURS

Atkins, Beaudoin, Berntson, Bolduc, Buchanan, Cochrane, Cohen, Comeau, DeWare, Di Nino, Doody, Forrestall, Ghitter, Grimard, Gustafson, Johnson, Kelleher, Kelly, Keon, Kinsella, Lavoie-Roux, LeBreton, Lynch-Staunton, Murray, Nolin, Oliver, Phillips, Rivest, Roberge, Rossiter, Simard, St. Germain, Stratton, Tkachuk-34 

ABSTENTIONS
LES HONORABLES SÉNATEURS

Aucune 

[Français

Les travaux du Sénat

L'honorable Jean-Maurice Simard: Honorables sénateurs, je propose...

Son Honneur le Président: Je regrette, il n'y a rien devant nous, à moins que ce ne soit un rappel au Règlement.

Le sénateur Simard: C'est un rappel au Règlement. Je propose, appuyé par le sénateur Grimard, que le Sénat consente au dépôt...

Son Honneur le Président: Nous en sommes au stade des affaires du gouvernement. On ne peut pas accepter des motions d'un sénateur. Il faut suivre l'ordre du jour, qui est sous la responsabilité du gouvernement.

[Traduction]

Le sénateur Simard: Je voudrais proposer une motion de dépôt de documents.

Son Honneur le Président: Bien sûr, si le Sénat vous y autorise, vous pouvez tout faire. Le sénateur Simard a-t-il la permission des honorables sénateurs de proposer une motion?

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je crois comprendre que le sénateur Simard veut demander au Sénat la permission de déposer plusieurs documents. Étant donné la nature très restreinte de la demande, nous lui donnerons, bien sûr, notre consentement.

Son Honneur le Président: Permission accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

[Français]

Le sénateur Simard: Pour la quatrième fois, je ferai une tentative. Je propose, appuyé par le sénateur Grimard, que le Sénat consente au dépôt du document du ministre Stéphane Dion, dont le sénateur Bolduc a cité des extraits plus tôt cet après-midi et que le Sénat consente également au dépôt du jugement du juge Sopinka, que le sénateur Joyal a cité partiellement plus tôt également.

Son Honneur le Président: Je ne peux pas accepter une motion mais la Chambre s'est déclarée prête à vous laisser déposer des documents. Vous avez lu les documents. On va prendre pour acquis que la Chambre vous a donné le droit de les déposer et qu'ils sont de fait déposés sans avoir une motion.

Le sénateur Simard: Je n'ai pas besoin de les déposer. Ma demande ne consiste pas à ce que je dépose les documents. Ma demande concerne les documents auxquels les sénateurs Bolduc et Joyal se sont référés.

Son Honneur le Président: La Chambre s'est déclarée d'accord au dépôt des documents. Il n'y a pas de discussion?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président: Nous considérons les documents déposés.

[Traduction]

(1620) 

Projet de loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie

Retrait et remplacement du rapport du comité

Permission ayant été accordée de revenir aux rapports de comité:

L'honorable Charlie Watt: Honorables sénateurs, je demande la permission au Sénat de retirer le rapport sur le projet de loi C-6 que j'ai présenté plus tôt aujourd'hui et de déposer une version révisée dans laquelle ont été ajoutés les mots «et en fait maintenant rapport sans amendement».

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, vous avez entendu la demande. Le Sénat consent-il à ce que le sénateur retire le premier rapport?

Des voix: D'accord.

(Le rapport est retiré.)

 

Rapport de comité

L'honorable Charlie Watt, président du comité sénatorial permanent des peuples autochtones, présente le rapport suivant:

Le mercredi 17 juin 1998

Le comité sénatorial permanent des peuples autochtones a l'honneur de présenter son 

SIXIÈME RAPPORT

Le comité, auquel a été renvoyé le projet de loi C-6, Loi constituant certains offices en vue de la mise en place d'un système unifié de gestion des terres et des eaux de la vallée du Mackenzie et modifiant certaines lois en conséquence, a, conformément à l'ordre de renvoi du 16 juin 1998, entendu le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien et étudié ledit projet de loi, et en fait maintenant rapport sans amendement.

Respectueusement soumis, 

Le président,
CHARLIE WATT

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Carstairs, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

 

Projet de loi de crédits no 2 pour 1998-1999

Troisième lecture

L'honorable Anne C. Cools propose: Que le projet de loi C-45, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 1999, soit lu une troisième fois.

(La motion est adoptée, et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté.)

 

Projet de loi de crédits no 3 pour 1998-1999

Troisième lecture

L'honorable Anne C. Cools propose: Que le projet de loi C-46, Loi portant octroi à Sa Majesté de crédits pour l'administration publique fédérale pendant l'exercice se terminant le 31 mars 1999, soit lu une troisième fois.

(La motion est adoptée, et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté.)

 

La Loi sur la défense nationale

Projet de loi modificatif-Deuxième lecture-Report du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Rompkey, c.p., appuyé par l'honorable sénateur Robichaud, c.p. (Saint-Louis-de-Kent), tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-25, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et d'autres lois en conséquence.

L'honorable Mabel M. DeWare: Je demande le report du débat au nom du sénateur Kelly.

(Le débat est reporté.)

 

La loi sur les parcs nationaux

Projet de loi modificatif-Deuxième lecture

L'honorable Mary Butts propose: Que le projet de loi C-38, Loi modifiant la Loi sur les parcs nationaux, soit lu une deuxième fois.

- Honorables sénateurs, c'est un plaisir pour moi de parrainer le projet de loi C-38 portant création du parc national Tuktut Nogait. L'adoption du projet de loi C-38 marquera une étape importante du projet d'établissement d'un réseau canadien de parcs nationaux, lesquels constituent vraiment un grand trésor pour notre pays. Ce système de parcs nationaux est cher à tous les Canadiens et envié partout au monde.

Les 38 parcs nationaux actuels protègent des exemples représentatifs du paysage canadien. Trente-neuf régions naturelles terrestres ont été identifiées d'un bout à l'autre du pays et on s'est fixé comme objectif de représenter chacune de ces régions au sein du système de parcs nationaux. Pour atteindre cet objectif, on doit créer de nouveaux parcs nationaux et Parcs Canada concentre ses efforts sur la création de ces nouveaux parcs.

Le projet de loi C-38 ajoute le parc national Tuktut Nogait au système des parcs nationaux. C'est un ajout important et bien reçu, puisque ce parc protégera la région naturelle des collines de la toundra à l'est d'Inuvik dans les Territoires du Nord-Ouest, une région qui n'était pas encore représentée dans le système.

La création de ce parc national permettra de protéger les ressources naturelles, ce qui comprend le paysage toundratique, plusieurs rivières bordées par des gorges profondes et bon nombre d'espèces de la faune dont le boeuf musqué, l'ours brun et le faucon pèlerin.

Le parc jouera également un rôle important au chapitre de la protection de la harde de caribous de Bluenose, ce qui constitue probablement un avantage plus connu. Pendant toutes les années pour lesquelles nous avons recueilli des données, la plus importante concentration de caribous de Bluenose en période de mise bas s'est toujours trouvée à l'intérieur des limites du parc national.

J'aimerais décrire la participation de la communauté dans la création de ce parc. La collectivité la plus proche du parc proposé est Paulatuk, un village d'environ 300 habitants. C'est de là qu'est d'abord venue l'idée de la création du parc. Ce sont les Inuvialuit eux-mêmes qui ont pressenti Parcs Canada en 1989 et proposé la création de ce parc national. Leur objectif premier était la protection de la harde de caribous de Bluenose, de son habitat et particulièrement de son aire de mise bas.

Parcs Canada a convenu de collaborer avec les autochtones pour étudier la possibilité de créer ce parc national. Sept années de consultations et de négociations ont suivi et, en 1996, l'entente visant la création du parc national a été signée par les gouvernements du Canada et des Territoires du Nord-Ouest, et quatre organisations représentant les autochtones.

Honorables sénateurs, les membres des Premières nations voient la création du parc comme une façon de diversifier l'économie locale et de protéger l'aire de reproduction de la harde de caribous du lac Bluenose.

En février dernier, le secrétaire d'État chargé de Parcs Canada a reçu de certains signataires de l'entente de 1996 une demande de révision des limites du parc national. Ces signataires voulaient qu'une partie du parc puisse faire l'objet d'exploration minière et de développement. Darnley Bay Resources Limited, société d'exploration minière de Toronto, détient des droits miniers dans la région et y poursuit des activités d'exploration. La demande de révision a été présentée conformément à l'article 22.1 de l'entente, qui exige toutefois que toutes les parties approuvent la révision proposée.

Le gouvernement fédéral n'étant pas d'accord, il a rejeté la demande pour diverses raisons. Premièrement, il y a la question des caribous. La partie qu'on proposait d'exclure du parc empiète sur le coeur de l'aire de reproduction de la harde de caribous du lac Bluenose. Des collectivités de la région dépendent de cette harde. Le fait de retrancher une partie de cette aire de reproduction met en péril une justification première du parc.

Deuxièmement, le premier ministre a clairement et invariablement exhorté le gouvernement des États-Unis à protéger les aires de reproduction harde de caribous de la Porcupine, en Alaska, comme le Canada l'a fait en créant de nouveaux parcs nationaux au Yukon. Les mesures que nous prenons au Canada doivent être conformes aux positions que nous défendons sur la scène internationale.

(1630)

Troisièmement, une évaluation des ressources minières et énergétiques de la région avait été réalisée dans le cadre de l'étude sur la possibilité de créer le parc. Selon le rapport rendu public qu'avait rédigé la Commission géologique du Canada en 1994, la région connue sous le nom d'anomalie de la baie Darnley aurait un potentiel modéré de cuivre, de nickel et de platine. La partie qu'on propose d'exclure du parc empiète sur cette anomalie. Il faut dire que toutes les parties connaissaient bien l'emplacement et le potentiel minier de l'anomalie avant de signer l'entente.

Quatrièmement, honorables sénateurs, 80 p. 100 de cette région se trouve à l'extérieur du parc national et demeure ouvert à des activités d'exploration et de mise en valeur. Une modification des limites n'est pas indispensable à la viabilité financière de ce projet d'exploration. En outre, l'association qui représente l'industrie minière canadienne n'a pas fait connaître de position concernant cette demande.

Enfin, l'intégrité des autres accords doit être prise en considération. Outre ce parc, sept autres parcs nationaux sont visés par des accords de création signés, mais ils ne sont pas encore régis par la Loi sur les parcs nationaux. Il est important que le gouvernement fédéral tienne ses obligations et assure l'intégrité de ces accords signés par le ministre au nom du Canada.

Le gouvernement fédéral ne désire pas créer un précédent qui ouvrirait la voie à d'autres modifications des limites des parcs nationaux pour permettre le développement commercial. Je pense notamment aux célèbres parcs nationaux Pacific Rim et Gros-Morne.

La demande d'examen des limites repose sur un besoin légitime et important de développement économique et de création d'emplois locaux pour les autochtones. En définitive, l'accord sur le parc contient de nombreux articles qui contribuent au développement de l'économie locale. L'entente accorde un traitement préférentiel aux autochtones en ce qui concerne l'embauche dans le parc, les marchés publics touchant le parc et le premier droit de refus applicable aux permis d'affaires dans le parc.

Paulatuk étant la collectivité la plus proche du parc, ses habitants sont ceux qui ont le plus à gagner des possibilités d'emplois liés aux activités du parc.

Au cours des dix prochaines années, Parcs Canada dépensera environ 10 millions de dollars pour créer et aménager ce parc, dans l'intérêt des autochtones et de tous les Canadiens. La création du parc entraînera dans son sillage la création d'emplois à long terme et un développement économique en harmonie avec le territoire et la culture du Nord.

Honorables sénateurs, en créant ce parc, nous préserverons, pour les générations futures, un élément très important du patrimoine naturel du Canada et nous assurerons à notre pays un héritage inestimable. Nous ne pouvons pas laisser passer cette responsabilité et les possibilités que le projet offre à tous les Canadiens.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu une deuxième fois.)

 

Renvoi au comité

Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Carstairs, le projet de loi est renvoyé au comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles.)

 

Les travaux du Sénat

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je crois comprendre que les deux côtés se sont entendus pour que nous entendions deux interpellations, l'interpellation no 34, inscrite au nom du sénateur Simard, et l'interpellation no 37, inscrite au nom du sénateur Grafstein, et que nous nous ajournions ensuite.

[Français]

 

Les langues officielles

La détérioration progressive des services en français pour les francophones hors Québec-Interpellation-Ajournement du débat

L'honorable Jean-Maurice Simard, ayant donné avis le mercredi 3 juin 1998:

Qu'il attirera l'attention du Sénat sur la situation qui prévaut présentement vis-à-vis l'application de la Loi sur les langues officielles, de sa détérioration progressive, du désengagement des gouvernements au cours des dix dernières années et de la perte d'accessibilité des services en français aux francophones hors Québec.

- Honorables sénateurs, la Loi constitutionnelle de 1867, par son article 133, contient des dispositions qui permettent aux Canadiens d'utiliser le français et l'anglais à l'intérieur de différentes institutions fédérales.

C'est donc dire que depuis la fondation du Canada, la réalité linguistique canadienne reçoit une attention particulière dans la vie politique de notre pays.

Cette réalité linguistique a maintes fois été l'objet d'études et d'analyses. Par suite de tout ce travail de réflexion, les formations politiques canadiennes en sont venues, au fil des ans, à adopter des positions sur la question linguistique. Ces positions ont ensuite permis l'adoption de mesures législatives et de modifications constitutionnelles censées favoriser l'aménagement d'un espace linguistique bilingue convivial au Canada.

C'est ainsi qu'en 1969, le Parlement canadien adoptait la Loi sur les langues officielles.

La Loi sur les langues officielles a pour objet, et je cite:

D'assurer le respect du français et de l'anglais à titre de langues officielles du Canada, leur égalité de statut et l'égalité de droits et privilèges quant à leur usage dans les institutions fédérales, notamment en ce qui touche les débats et travaux du Parlement, les actes législatifs et autres, l'administration de la justice, les communications avec le public et la prestation des services, ainsi que la mise en oeuvre des objectifs de ces institutions; d'appuyer le développement des minorités francophones et anglophones et, d'une façon générale, de favoriser, au sein de la société canadienne, la progression vers l'égalité de statut et d'usage du français et de l'anglais; de préciser les pouvoirs et les obligations des institutions fédérales en matière de langues officielles.

Depuis, à la faveur du rapatriement de la Constitution et de l'adoption de la Charte des droits et libertés, en 1982, et par suite de la révision de la Loi sur les langues officielles, en 1988, diverses mesures ont été mises en place pour accentuer le caractère bilingue des institutions du Canada. De plus, les gouvernements provinciaux ont alors accepté certaines obligations liées à l'enseignement du français et à la prestation de services en français dans leur province respective.

Toutefois, au cours de la dernière décennie, les gouvernements fédéraux ont mis l'accent sur la nécessité d'atteindre l'équilibre budgétaire, par voie de coupures, de compressions, de privatisations, de décentralisation. Priorité de toutes priorités, cette quête de l'équilibre budgétaire, toute honorable qu'elle soit, a malheureusement relégué à l'arrière-plan l'application et la promotion des deux langues officielles du pays.

À cet égard, la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada et d'autres organismes voués à la défense et à la promotion du fait français au Canada font état dans différents documents de l'impact des coupures budgétaires du gouvernement canadien sur leur capacité de maintenir leurs propres services aux membres de leurs associations.

À l'instar de ces associations, le commissaire aux langues officielles du Canada a lui aussi mis en relief des lacunes majeures en rapport avec la mise en oeuvre de la Loi sur les langues officielles du Canada. Selon lui, les compressions budgétaires et la restructuration de l'appareil gouvernemental:

 

[...] ont entraîné une érosion subtile mais cumulative des droits linguistiques et, au sein de l'administration fédérale, ont affaibli le programme des langues officielles.
À la lumière de ces informations, il semblerait donc que la Loi sur les langues officielles ne soit plus une priorité pour le gouvernement central du Canada. Est-ce exact?

Pour le savoir, et pour obtenir le portrait le plus précis possible de la situation linguistique telle que vécue par les francophones au Canada, j'ai décidé d'engager, au cours des prochains mois, une étude sur cette question extrêmement importante.

Dans le cadre de cette étude, je me propose de consulter les principales associations vouées à la défense et à la promotion des droits linguistiques au pays. Je compte également entrer en communication avec les principales formations politiques de chaque province et celles oeuvrant au fédéral afin d'obtenir des renseignements relatifs à leurs positions politiques et à leurs intentions sur cette question.

Je vais aussi prendre contact avec les représentants régionaux du commissaire aux langues officielles, de même qu'avec divers groupes sectoriels dont le mandat vise l'avancement de la francophonie. Au Nouveau-Brunswick, je pense, notamment, à l'Association des enseignants et enseignantes francophones, à l'Association des municipalités du Nouveau-Brunswick, à l'Association des artistes professionnels du Nouveau-Brunswick. Ce sont là des exemples, car il y en a bien d'autres, et je compte les inviter aussi à collaborer avec moi pour que cette étude soit le reflet le plus fidèle et le plus juste possible de la réalité du fait français au Canada à l'aube du XXIe siècle.

Enfin, il va sans dire que j'entends aussi inviter le grand public à me faire part de ses idées sur la question.

Ce que je souhaite recueillir de ces formations, groupes, associations ou citoyens, ce sont essentiellement, d'une part, des documents qui feraient état de la situation linguistique dans leur province relativement à la Loi sur les langues officielles, à la Charte des droits, à la Constitution et, d'autre part, leurs suggestions pour améliorer la situation et pour mieux réaliser les objectifs de la dualité linguistique officielle au pays.

Ensuite, je déposerai ici, à l'automne, un document qui fera état des progrès ou des détériorations vis-à-vis l'accessibilité à des services en français au Canada. Et j'annexerai à ce document une photocopie de tous les documents qui m'auront été transmis par les formations politiques et les associations, afin que vous puissiez par vous-mêmes tirer vos propres conclusions.

Entre-temps, je souhaite vivement que vous acceptiez généreusement de me faire connaître vos opinions sur le sujet. D'ici là, qu'il me soit permis, honorables sénateurs, d'ajourner ce débat et de vous revenir à l'automne avec les résultats de mon travail.

(Sur la motion du sénateur Simard, le débat est ajourné.)

[Traduction]

 

Le groupe interparlementaire Canada-États-Unis

La trente-neuvième assemblée annuelle tenue à Nantucket-Interpellation-Ajournement du débat

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein, ayant donné avis le 15 juin 1998:

Qu'il attirera l'attention du Sénat sur la trente-neuvième assemblée annuelle du Groupe interparlementaire Canada-États-Unis, tenue à Nantucket en mai 1998.

(1640)

- Honorables sénateurs, il y a environ 120 ans, un récent diplômé de Harvard, Theodore Roosevelt, publiait son premier livre, une histoire très documentée de la guerre navale de 1812. Ce travail a eu une influence considérable sur son point de vue stratégique et il a essayé d'étendre la doctrine de Monroe de 1823, qui était le résultat des expériences personnelles de trois présidents américains - Monroe, Jackson et John Quincy Adams - pendant la guerre de 1812. Theodore Roosevelt était d'avis que l'application étroite de la doctrine de Monroe devait être étendue à l'ouest, au-delà d'Hawaii, pour inclure les Philippines, dans le Pacifique, et à l'est, au-delà de Cuba, dans l'Atlantique Sud.

Après avoir été nommé secrétaire adjoint à la marine, en 1897, Roosevelt critiquait, dans son tout premier discours donné à la Naval War Academy, la stratégie du président Thomas Jefferson pendant la guerre de 1812, affirmant que Jefferson avait essayé de protéger la côte Est avec de petits navires de défense au lieu d'une flotte de navires d'attaque qui, de l'avis de Roosevelt, aurait évité la guerre de 1812. L'idée de Roosevelt était qu'une puissance navale agressive pouvait élargir le périmètre et les paramètres de la doctrine de Monroe, et cela a eu une influence considérable sur la pensée stratégique de l'Amérique au XXe siècle.

Honorables sénateurs, à quelques pieds de cette Chambre se trouve le canal Rideau qui relie la rivière des Outaouais au Bas-Saint-Laurent et au lac Ontario, tout cela sur des eaux intérieures canadiennes. Le canal Rideau a été terminé en 1832 puis amélioré, mais sa construction avait été décidée suite à la guerre avec les États-Unis, cette même guerre de 1812.

Les sénateurs se souviendront qu'en 1813, durant la guerre, les Américains ont attaqué et incendié les édifices du gouvernement à York, qui était alors la capitale du Haut-Canada et qui est maintenant Toronto; et, qu'en 1814, la ville de Washington, DC, a été incendiée en guise de représailles. Ces actes ont mené au traité de Gand en 1814, qui marquait la dernière fois où le Canada et son voisin du sud ont pris les armes l'un contre l'autre et échangé des coups de feu.

Honorables sénateurs, le canal Rideau a été stratégiquement aménagé pour permettre à nos forces navales et militaires d'accéder au lac Ontario et de renforcer ses défenses, sans avoir à passer par la rive vulnérable du Saint-Laurent, entre Cape Vincent et Cornwall.

Honorables sénateurs, le sénateur Moynihan, de New York, nous rappelle dans son ouvrage peu volumineux, mais inestimable, intitulé: On the Law of Nations, que le réseau du canal Rideau «a effectivement mis fin à la possibilité d'un conflit armé» entre le Canada et les États-Unis «et a sans doute sauvé tant Toronto que Washington, DC, d'une autre destruction par le feu». Il ajoute: «et pourtant cela n'a pas été convaincant. Le fait est que les riverains du Saint-Laurent ont changé d'idée...»

Oui, tant le Canada que les États-Unis ont changé d'idée et déposé les armes, et les seconds, renoncé à leurs ambitions au Nord. Il en est résulté l'établissement pacifique de la plus longue et de la plus ancienne frontière non défendue de l'histoire moderne. D'ennemis, le Canada et les États-Unis sont devenus amis, partenaires commerciaux et alliés par excellence.

Aujourd'hui, les États-Unis sont le meilleur partenaire commercial du Canada, et vice versa. Depuis la conclusion de l'ALE et de l'ALENA, nos échanges commerciaux bilatéraux ont grimpé à plus de 400 milliards de dollars par année. Les échanges commerciaux entre les deux pays s'élèvent quotidiennement à 1,25 milliard de dollars. Toutes les semaines, plus d'un million de personnes vont et viennent d'un côté à l'autre de cette même frontière, et ce chiffre grossit toujours.

C'est en gardant à l'esprit nos intérêts nationaux vitaux et nos relations étroites que nous avons tenu la trente-neuvième assemblée annuelle du Groupe interparlementaire Canada-États-Unis cette année à Nantucket, qui s'est avérée l'une de nos plus productives.

Répartis en trois ateliers - un premier portant sur le commerce et l'économie, un deuxième sur les questions politiques et mondiales et un dernier sur les questions transfrontalières -, les délégués ont d'abord discuté, en détail, tant du point de vue canadien que du point de vue américain, plus de 38 questions différentes. Par exemple, à l'atelier que j'ai présidé, soit celui sur le commerce et l'économie, il a été question de culture et de bois d'oeuvre, de pommes de terre, de sucre, de grain, de produits laitiers et d'électricité. À l'atelier sur les questions transfrontalières, on a étudié les problèmes de congestion observés à un certain nombre de postes frontière, qui nuisent à la liberté des échanges de biens et de services. Dans l'atelier sur les questions politiques et mondiales, il y a eu des discussions franches et en profondeur où les opinions divergeaient ou convergeaient sur des questions internationales comme le commerce transatlantique avec la Bosnie, Cuba et la Chine et les répercussions de la crise économique en Asie, aussi bien que les conséquences des essais nucléaires dans le sous-continent asiatique.

À la séance plénière, les délégués ont examiné toutes les questions. À l'unanimité, ils ont décidé d'amorcer un processus beaucoup plus actif pour échanger les opinions d'intérêt bilatéral d'une manière plus détaillée entre les assemblées annuelles, car tous les délégués étaient d'avis qu'un certain nombre de sujets nécessitent des échanges plus réguliers, plus amicaux et à des moments plus opportuns.

Les participants à la séance plénière ont décidé de tenir une réunion bilatérale sur la côte Ouest, pour échanger leurs vues dans les dossiers litigieux du bois d'oeuvre et de la pêche. À la suggestion du représentant Ben Gilman, président du comité des affaires étrangères de la Chambre des représentants, on organisera une rencontre entre les parlementaires et les représentants de nos gouvernements respectifs pour faciliter l'établissement d'un front commun nord-américain sur le trafic des stupéfiants. On organisera une autre rencontre bilatérale qui permettra à nos parlementaires et à nos représentants de prendre en considération nos intérêts communs par rapport à une approche commerciale transatlantique et, espérons-le, à l'élaboration d'un plan d'action transatlantique commun.

Une rencontre bilatérale à laquelle participeront des représentants de nos deux pays permettra aussi de régler des problèmes importants qui se posent aux postes frontaliers et qui causent de la congestion et des inquiétudes. Les participants à cette rencontre échangeront notamment leurs vues sur le prix des cigarettes, sur une approche commune pour lutter contre la contrebande transfrontalière des produits du tabac, sur l'immigration et sur d'autres points de friction aux frontières.

Parce que le week-end s'est déroulé en toute simplicité, les membres des deux délégations parlementaires ont pu examiner plus en profondeur les questions ainsi que la dynamique et les personnalités politiques qui inspirent nos deux pays. Nous avons convenu de coopérer, lorsque c'est possible, pour faciliter l'élimination des irritants commerciaux. Nous sommes heureux d'annoncer que, dans certains secteurs, ces irritants ont pu être éliminés depuis le début de nos rencontres annuelles et que d'autres ont presque disparu. Quoi qu'il en soit, les irritants commerciaux concernent moins de 2 p. 100 de l'ensemble de notre commerce bilatéral.

D'un point de vue canadien, nous considérons ces assemblées indispensables pour permettre à nos parlementaires d'avoir un précieux échange d'opinions, libre et franc, sur des questions litigieuses. Les deux groupes estiment que nous devons maintenant intensifier notre connaissance des faits et de nos réalités politiques respectives afin d'agir plus rapidement pour résoudre les problèmes communs. Nos peuples l'exigent.

Nous avons hâte à la prochaine assemblée annuelle qui se tiendra au Canada, à Québec, l'an prochain. Nous espérons pouvoir maintenir la dynamique établie par des délégués intéressés à résoudre, là où c'est possible, nos problèmes communs et à poursuivre nos intérêts communs.

Bien que les Canadiens et les Américains partagent de nombreux traits similaires, il est évident que le Canada est différent de son voisin du sud, plus vigoureux et plus populeux. Les Canadiens croient que la culture demeure inséparable de notre psyché et de notre identité nationales, tandis que les Américains considèrent la culture simplement comme un autre produit commercial très important. Les Canadiens croient que l'on peut mieux inculquer les valeurs démocratiques à des États aberrants comme Cuba grâce à des échanges commerciaux bilatéraux et à un engagement constructif. Les sénateurs se rappelleront que le Canada a reconnu la Chine rouge, un État aberrant à l'époque, avant les États-Unis, précisément dans ce but.

Les Canadiens sont plus attachés matériellement les uns aux autres, plus branchés entre eux. Nous faisons plus d'appels téléphoniques par habitant. La pénétration de la câblodiffusion est beaucoup plus forte au Canada qu'aux États-Unis. Notre société bilingue est à l'oeuvre grâce aux émissions quotidiennes de la radio et de la télévision de langue française et de langue anglaise qui atteignent pratiquement toute notre population d'un océan à l'autre. Les Canadiens publient davantage de livres par habitant, même s'ils ne sont pas lus. Nos systèmes d'éducation diffèrent en ce sens que nous utilisons les fonds publics pour l'enseignement public laïque aussi bien que religieux. Alors que les Américains croient que le droit de port d'armes est un droit, les Canadiens considèrent cela comme un dangereux privilège qui doit être assujetti à une réglementation rigoureuse. Les Canadiens croient que la santé constitue une priorité nationale pour protéger tous les individus de la crainte; c'est pourquoi nous préférons un régime d'assurance-maladie universel et accessible à tous les Canadiens, sans égard à la capacité de payer.

Les Canadiens chérissent la possibilité qu'ils ont de faire des choix différents de ceux de leurs voisins du sud. Même si nous sommes différents de nos amis américains, personne ne peut nier la suprématie du leadership américain dans le monde quand il s'agit de résoudre des problèmes pressants et de promouvoir la démocratie dans tous les coins de la planète. Les parlementaires vont persévérer dans leurs efforts communs en espérant que le Groupe interparlementaire Canada-États-Unis puisse acquérir une compréhension plus vive et plus profonde de nos divergences ainsi que de la force des valeurs que nous partageons. Nous croyons qu'il peut y avoir de l'unité dans la diversité.

En tant que coprésident, je remercie le coprésident canadien, Joe Commuzzi, de l'autre endroit, pour les efforts constants et persévérants qu'il déploie pour établir des rapports plus proactifs entre le Canada et les États-Unis. Je profite de l'occasion pour remercier nos vis-à-vis américains, le sénateur Frank Murkowski, de l'Alaska, et Amo Houghton, représentant de New York, ainsi que leurs femmes, Nancy et Priscilla, pour leur aimable hospitalité, qui a permis que les échanges soient très informatifs, productifs et agréables.

Honorables sénateurs, à titre de coprésident, je peux déclarer que notre délégation, composée de représentants de tous les partis au Sénat, soit les sénateurs Bolduc, Oliver, Perrault, Hays, Lewis et Buchanan, était très bien informée et avait de l'information à communiquer. Je l'ai déjà dit, l'an prochain, le Canada sera l'hôte de cette rencontre à Québec. Nous pourrons alors donner à nos vis-à-vis américains la possibilité de voir de plus près les courants et les contre-courants à l'oeuvre dans la société canadienne.

Honorables sénateurs, lors de nos réunions, nous avons assisté à des échanges musclés entre nos vis-à-vis américains sur les orientations des politiques. Cela m'a rappelé les paroles d'un des pères fondateurs des États-Unis, John Adams, qui avait dit: «La mission de l'Amérique n'est pas seulement d'égaler ou d'imiter le moteur de l'action humaine, elle est d'exceller à cette tâche.» Ce sera à tout jamais sa mission.

Amen.

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, je voudrais poser une question au sénateur Grafstein, s'il me le permet.

Le sénateur Grafstein: Mais bien sûr.

Le sénateur Prud'homme: Comme l'honorable sénateur le sait peut-être, avec d'autres sénateurs, je prévois rédiger cet été un rapport sur toutes les associations parlementaires, notamment sur l'avenir de tous les groupes d'amitié officiels et non officiels. En tant que président du Groupe interparlementaire Canada-États-Unis, l'honorable sénateur a probablement reçu une lettre. Il pourrait peut-être éclairer ma lanterne en nous disant comment, d'après lui, nous pourrions faire mieux connaître et comprendre ces associations parlementaires au Canada.

Ayant rédigé un rapport en 1993, il y a une suggestion que je serais prêt à prendre en considération et c'est que, si nous devions abolir toutes les associations parlementaires, la seule que nous devrions conserver est prioritairement l'association canado-américaine, pour les raisons évidentes que l'honorable sénateur a très bien énoncées. Le groupe est très actif, mais je suis convaincu que l'honorable sénateur, comme moi, doit déplorer vivement parfois que nos vis-à-vis y soient beaucoup moins assidus. Il semble très difficile de les motiver, même pour une seule fin de semaine.

L'honorable sénateur pourrait-il nous dire en quelques mots comment nous pourrions faire face à la situation en ce qui concerne l'association la plus prioritaire? Je dis cela sans vouloir le moins du monde dénigrer les autres associations. Comment cette association pourrait-elle devenir un exemple vivant de notre collaboration avec les États-Unis et comment pourrions-nous raviver l'intérêt de certains Américains afin qu'ils y travaillent plus sérieusement?

Le sénateur Grafstein: Tout d'abord, je remercie le sénateur Prud'homme de sa lettre. J'espère que mon intervention d'aujourd'hui pourra tenir lieu de réponse à cette lettre, parce que c'est une description très détaillée de ce que nous avons tenté de faire. Qu'on me permette donc de prendre un moment pour expliquer ce que nous avons fait.

Quand je suis devenu coprésident, j'ai constaté que ces réunions annuelles n'étaient pas suffisantes, dans le sens que les relations entre le Canada et les États-Unis étaient tellement diversifiées qu'il fallait aborder les questions dans une perspective plus étroite. En deux ans, nous sommes passés d'une rencontre bilatérale par année à quatre rencontres bilatérales prévues pour cette année, avant la prochaine rencontre bilatérale annuelle. Le sénateur Buchanan interviendra sur cette interpellation un peu plus tard et parlera d'une cinquième rencontre bilatérale sur la côte Est. Autrement dit, il y en aura une concernant la côte Est, une concernant la côte Ouest, une relative aux drogues, une sur le plan d'action transatlantique et une sur les problèmes interfrontaliers, le tout avant la prochaine rencontre annuelle ordinaire.

On ne peut attendre d'un petit groupe de législateurs américains, qui sont occupés à autre chose et qui ne comprennent pas l'importance de notre activité commerciale, qu'ils consacrent du temps à toutes ces questions. M. Comuzzi et moi sommes allés aux États-Unis avec le premier ministre, au moment où il a rendu visite au président Clinton. Nous n'avons pas rendu visite au président Clinton. Nous avons plutôt employé notre temps à rencontrer un certain nombre de représentants et de sénateurs. M. Comuzzi et moi-même avons tenu une petite réception au Congrès. Nous avions invité 15 sénateurs, et 14 d'entre eux se sont présentés. Le quinzième, le sénateur Hutchison, du Texas, m'a téléphoné personnellement pour me dire qu'il devait assister à une autre réunion de comité et qu'il ne pourrait venir à notre réception. Nous avons eu un taux de réponse de 15 sénateurssur 15.

Le représentant Gilman, de New York, qui est président du très influent comité des affaires étrangères de la Chambre des représentants, n'avait pas l'intention de venir ni de participer. M. Comuzzi et moi-même l'avions rencontré l'année dernière et nous l'avions alors invité. Il est venu pour la première fois. C'est ainsi qu'il a pu nous suggérer la tenue d'une rencontre bilatérale visant à nous organiser pour faire front commun, concernant le problème de la drogue, une question qui le préoccupe. Nos avons accepté sa suggestion.

Je crois que nous avons ainsi, à différents égards, une meilleure communication avec le Congrès, où la plupart des grandes décisions sont prises. Nous avons donc une relation plus étroite. Toutes ces rencontres bilatérales portaient essentiellement sur des initiatives de nos homologues américains, même si je crois que nous avons été pour quelque chose dans la mise sur pied de ces initiatives.

(1700)

Par exemple, sur la côte ouest, une région où il y a beaucoup de controverses et de problèmes avec le bois d'oeuvre et le poisson, le sénateur Patty Murray, de l'État de Washington, a déclaré qu'une rencontre bilatérale devrait avoir lieu à la frontière. Elle aura lieu sitôt qu'elle pourra se libérer. Elle est maintenant candidate à des élections.

Honorables sénateurs, tous les partis étaient représentés dans cette délégation - le Parti réformiste, le Bloc, et cetera. On a confié des rôles à tous les membres de la délégation et nous nous sommes tous comportés comme si nous formions une délégation. Il y avait des divergences d'opinion mineures qui ne sont pas vraiment apparues lors de nos échanges avec les Américains. Par contre, comme je l'ai signalé dans mes observations, il y a eu un débat animé entre les Américains. Nous les exhortions à accélérer le règlement des questions commerciales touchant le Canada et l'Europe et l'OMC. Les Américains ne l'ont pas encore fait. Nous avons été témoins d'un débat très animé, puisque les membres du Sénat américain défendaient notre position et disaient qu'il fallait accélérer les choses, alors que certains membres de la Chambre des représentants étaient contre, pour des motifs d'ordre politique. Nous nous sommes contentés d'être des témoins très intéressés.

Ma longue réponse à votre brève question, sénateur Prud'homme, c'est que je crois que nous pouvons intensifier nos relations grâce à certaines activités. Je pense que ces groupes interparlementaires sont très utiles au gouvernement.

Ainsi, en ce qui concerne la raison pour laquelle le Canada n'a pas de succès en Europe avec son plan d'action, et c'est une des choses qui inquiétaient le sénateur Bolduc, moi-même et d'autres sénateurs, nous avons découvert que les Européens nous en veulent en ce moment pour de nombreuses bonnes raisons. Cependant, nous nous sommes aperçus que nous avions une position commune avec les sénateurs américains et les membres du Congrès des États-Unis qui veulent eux aussi faire réduire les subventions agricoles en Europe pour que les produits agricoles puissent entrer sur ce marché. J'espère que nous pourrons aider le gouvernement à faire progresser cette question, pour le plus grand bien des deux pays. Je constate qu'on réalise des progrès fondamentaux à petits pas.

(Sur la motion du sénateur Berntson, au nom du sénateur Buchanan, le débat est ajourné.) 

Les travaux du Sénat

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, les sénateurs des deux côtés ont accepté que tous les points au Feuilleton demeurent dans l'ordre où ils sont aujourd'hui.

(Le Sénat s'ajourne à 14 heures demain.) 


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